L'adoption du Saint-Martin Unity flag comme symbole d'unité, fait débat sur la forme
Si tous les élus étaient d’accord sur le fond, ils ne l’étaient pas sur la forme. Le président de la Collectivité Louis Mussington a proposé aux membres du conseil territorial réunis en séance plénière jeudi dernier, d’adopter le drapeau de Saint-Martin dont les couleurs dominantes sont le vert, le jaune et le bleu, comme «symbole conjoint de l’affirmation de l’unité et de l’identité de Saint-Martin».
Le 23 août dernier, le président de la COM et la Première ministre de Sint Maarten se sont rencontrés afin de réfléchir à «l’importance à donner au St Martin Unity Flag dans [leur] contexte administratif respectif ». Considérant que «les deux communautés nationales [ont toujours vécu] en paix et en harmonie durant des siècles », que «les habitants de l’île ont à maintes reprises démontré leur attachement à la question de l’unité culturelle de ce territoire », ils ont convenu d’adopter « un symbole culturel qui serait commun aux deux parties du territoire». Et d’un commun accord, ils ont suggéré que ce symbole soit le St Martin Unity Flag, dévoilé le 31 août 1990 et conçu en partie par Daniela Jeffry.
«Il s’agit d’un acte d’unité culturelle conventionnelle dont l’objectif est de satisfaire les besoins physiques, émotionnels, psychologiques et spirituels des Saint-Martinois à travers une variété de pratiques culturelles», a expliqué Louis Mussington à ses collègues du conseil territorial.
Angeline Laurence a été la première à commenter l’initiative. Très émue, elle a confié être née en partie hollandaise, avoir grandi en partie française et se sentir Saint-Martinoise. Elle affirme admettre la nécessité d’avoir un drapeau symbolisant l’unité ; cependant elle estime que dans un premier temps il serait davantage pertinent de faire en sorte que «le traité de Concordia soit reconnu» officiellement par la France et puisse ainsi avoir une valeur. Au sujet d’un drapeau, elle a suggéré d’associer les élèves des écoles des deux parties de l’île à sa conception.
Daniel Gibbs partage cette vision et propose que l’ensemble population soit associé au choix du drapeau, comme cela avait été le cas en Guadeloupe et en Martinique. «Nous ne sommes pas contre l’unité mais contre la façon dont le choix du drapeau est proposée », a-t-il martelé pour justifier la position de la Team Gibbs qui n’a pas pris part au vote non plus. Jules Charville pense aussi que la majorité «met la charrue avant les bœufs», toutefois il a pris part au vote et a voté pour.
Saisi pour avis, le conseil économique et social (CESC) a demandé le retrait de la délibération pour des raisons similaires. «Si le drapeau commun est un projet de symbole d’unité culturelle partagée par le CESC », celui-ci émet de «sérieuses réserves sur la méthodologie ». Il regrette qu’aucun «travail d’identification d’un socle de valeurs communes partagées par tous les Saint-Martinois », n’a été réalisé. Il aurait préféré «une approche collective ». «C’est un travail long et rigoureux qui doit être mené afin que chaque habitant se considère comme partie intégrante d’une communauté. De ce travail à l’échelle territoriale ressortira ce socle de valeurs partagées qui pourront être symbolisées sur un drapeau », convient le CESC représenté par son président Julien Gumbs.
Les conseillères territoriales de la majorité Dominique Louisy, Bernadette Davis et Valérie Damaseau ont rétorqué en insistant sur «le caractère culturel et historique» de ce drapeau qui représente les deux côtés de l’île. «En l’adoptant comme symbole conjoint, personne d’autre ne pourra se l’approprier», a confié Dominique Louisy qui a toujours connu ce drapeau depuis son arrivée sur l’île.
Louis Mussingon a clôturé, de manière «passionnée», le débat qui a duré près de 1h15. Le président de la COM ne partage pas l’avis de ses collègues de consulter la population sur le choix du drapeau. Il considère qu’elle l’a déjà adopté. «Le référendum a eu lieu le 26 septembre 2020, nous étions des milliers dans la rue à Bellevue » à brandir ce drapeau, a-t-il rappelé ; le 16 septembre 2020 ayant été le jour de l’organisation de la marche pour protester contre la fermeture de la frontière pendant la crise sanitaire liée au covid-19. «Ce drapeau n’est pas un drapeau politique, mais un symbole », a-t-il précisé.
« Nous sommes dans le droit d’affirmer notre identité. Nous existons en tant que peuple et tant que tel nous avons le droit d’adopter un symbole qui dit, qui affirme, qui s’exprime à notre place par moment, pour dire oui nous sommes des Saint-Martinois fiers de l’être », a-t-il clamé. Et c’est ce message que Louis Mussington souhaite faire passer à travers ce drapeau.
La délibération a finalement été adoptée ; seuls six conseillers territoriaux (Team Gibbs + Mélissa Rembotte + Angeline Laurence) n’ont pas pris part au vote. Désormais le Saint Martin Unity flag est le «symbole conjoint de l’affirmation de l’unité et de l’identité de Saint-Martin». Il sera élevé lors de la prochaine commémoration du Saint Martin Day le 11 novembre.