Pêcheurs de loisir : une enquête a été menée pour mieux les connaître
En 2020, l’Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (Ifremer) a lancé une grande étude de la pêche non-professionnelle dans les Antilles françaises. Nommé Recreafish, le projet a concerné la pêche récréative en mer en Martinique, Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Tous pêcheurs à pied (coquillages, crabes…), en apnée, du bord ou depuis une embarcation, pêcheurs occasionnels (moins de 5 sorties dans l’année) à très réguliers (plusieurs sorties par semaine), pêcheurs ciblant une seule espèce ou un large éventail d’espèces, étaient invités à partager leur expérience afin de permettre à l’Ifremer de collecter des informations fiables sur le poids économiques de la pêche maritime de loisir aux Antilles, d’identifier les pratiques, les espèces capturées et celles rejetées. Deux études ont été menées : une portant sur les carnets de pêche, une autre sur le taux de pénétration de la pêche de loisir.
Etude «carnets de pêche »
A Saint-Martin, quatorze pêcheurs se sont inscrits mais au bout d’une année de suivi, onze n’étaient jamais sortis ou avaient abandonné pour des raisons diverses (manque de temps, santé, déménagement, lassitude, non réponse…). Leurs fiches de pêche n’ont donc pas été prises en compte. Les résultats disponibles par Ifremer se sont limités aux retours des carnets de trois pêcheurs sur une période complète de 12 mois, totalisant quatre sorties de pêche (une depuis le bord, une chasse sous-marine et une pêche depuis une embarcation) et 35 prises*. «Dans ces conditions, les résultats ne peuvent être exploités et il sera nécessaire de relancer une étude spécifique sur ce territoire pour compléter les premières données acquises via l’enquête de cadrage », indique l’Ifremer.
Etude de cadrage
En parallèle de l’analyse des carnets de pêche, l’Ifremer a effectué une étude dite de cadrage visant à évaluer le taux de pénétration de la pêche de loisir, estimer le nombre de pratiquants et caractériser leurs profils (modes de pêche, fréquence des sorties, secteurs fréquentés, etc.). Cette étude s’est notamment déroulée par téléphone auprès de résidents de Martinique, Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy du 19 novembre au 19 décembre 2020.
Au total, 3 500 ménages ont été interrogés à partir de fichiers de coordonnées téléphoniques localisées (fixes et mobiles). Plus de 99 000 contacts téléphoniques ont été nécessaires pour atteindre ces quotas, les non-réponses et refus ont été fréquents dans ce genre de situations, souligne l’Ifremer. A Saint-Martin, 177 enquêtes ont été menées sur les 350 envisagées. C’est le seul territoire où l’Ifremer a réalisé moins d’enquêtes que l’objectif fixé.
L’analyse de l’ensemble des données montre un taux de pénétration, c’est-à-dire une proportion de foyers avec pêcheurs, de 17,8 % à Saint-Martin et 18,2 % à Saint-Barth, contre 11 ou 12 % en Guadeloupe et Martinique. Aux Antilles, les ménages (au sein desquels l’activité est pratiquée) sont composés en moyenne d’1,3 pêcheur de 15 ans et plus, quelle que soit l’île. Le nombre de pêcheurs de loisir est estimé à 3 162 à Saint-Martin.
Globalement, les Antillais pêchent du bord (45%) et depuis une embarcation (41%), la pêche en apnée étant la moins prisée (15%). Saint-Martin ne s’inscrit pas dans cette tendance : 44 % des personnes interrogées pêchent depuis une embarcation, 40 % à pied et un quart en apnée depuis le rivage**.
Les deux tiers des personnes interrogées pêchent avec une canne, 30 % avec un fusil/harpon et 13 % avec une ligne de traine. Ces pratiques sont similaires en Martinique et en Guadeloupe. A Saint-Barth, 48 % utilisent une canne, 6 % un fusil/harpon et 30 % une ligne de traine.
Concernant les lieux de pêche, plus d’un pêcheur sur trois fréquente les eaux du large ou celles de Saint-Barth. «Les côtes françaises sont également très fréquentées (66%), contrairement aux côtes néerlandaises, non plébiscitées. Une réglementation spécifique existe dans ces eaux étrangères (interdiction de la pêche de loisir au harpon par exemple), ce qui pourrait expliquer l’absence de fréquentation par les pratiquants. Un pêcheur sur trois se rend sur la côte orientale française alors qu’elle est occupée en grande partie par la Réserve Naturelle, interdite à la pêche », rapporte l’Ifremer.
Les dépenses moyennes liées à l’activité sont assez importantes, autour de 160 €, hormis sur Saint-Martin où elles s’élèvent à environ 87 euros par an. Pour les pêcheurs qui possèdent un bateau, les dépenses sont beaucoup plus importantes, de l’ordre de 1440 euros par an.
L’âge moyen d’un pêcheur de loisir à Saint-Martin est de 44 ans. Neuf pêcheurs sur dix sont actifs (40% employés). Quasiment deux pêcheurs sur deux pratiquent cette activité depuis plus de vingt ans.
Enfin, la plupart des personnes interrogées sur les quatre îles ont confié que «leur bonheur se résumait principalement à aller pêcher», qu’importe le nombre de prises. «Ces informations laissent à penser que les personnes interrogées dans le cadre de cette enquête sont peu représentatives des pêcheurs de subsistance. En effet, ces derniers adoptent un comportement différent vis-à-vis des captures dont la quantité va impacter véritablement les conditions de vie du foyer », commente l’Ifremer.
* Les 35 prises étaient composées de 5 carangues coubalis, 5 gorettes gueule rouge, de 2 gorettes jaunes, d’une gorette indéterminée, de 2 mombins, de 3 girelles communes et 2 arc-en-ciel, d’un couronné rouge, d’une carpe rouge, de 3 langoustes royales (3) ainsi que de 2 balaous.
** La somme des pourcentages, supérieure à 100 %, s’explique par le fait que certains pêcheurs pratiquent plusieurs modes de pêche.
Télécharger l'étude de cadrage :
(Photo d'illustration)