10.07.2023

Les Saint-Martinois ont rendu un dernier hommage et au revoir à Albert Fleming

Le 28 juin, à l'annonce du décès d’Albert Raoul Fleming, ancien et dernier maire de Saint-Martin, l’île tout entière a été «attristée par la mort d’un grand homme politique », confie Louis Mussington, président de la Collectivité de Saint-Martin.

Vendredi 7 juillet, de nombreuses personnalités se sont réunies une dernière fois pour les funérailles de «Monsieur le Maire», sur le front de mer, Albert Fleming avait une affection particulière pour la mer. Tous ont témoigné de leur affection et admiration pour l’homme qu’il représentait et représente encore aujourd’hui.

Il aura invraisemblablement laissé une empreinte indélébile à Saint-Martin, tant pour les anciens que pour la jeunesse. Tous s’accordent à dire qu’Albert Fleming était "un homme par son peuple, pour son peuple, avec son peuple". Grâce à "sa conviction et son dévouement", il a amené l’île de Saint-Martin dans ce qu’il estimait être le meilleur pour son territoire et ses habitants.

Des chants dont «O sweet Saint Martin’s Land» interprété par Malaika Maxwell ainsi que les témoignages d’amis, collègues, familles, officiels ont rythmé la cérémonie. Le parcours d'Albert Fleming a été retracé via plusieurs discours. Brenda Brooks a exprimé les précieux souvenirs de son père et a rappelé l’attachement qu’il avait pour les Saint-Martinois avec « générosité et engagement ».

«L’humanisme», représente bien Monsieur le Maire pour Jean-Paul Fisher. Il salue le grand homme qu’il était, « ton souvenir illumine ma mémoire, nos mémoires que nous portons tous dans nos cœurs», atteste-t-il.

En effet, pour beaucoup, Albert Fleming était "profondément enraciné dans l’humanisme, et avait par nature un amour démesuré pour les enfants et une vénération sincère de la personne âgée". Audrey Gil, présidente du conseil d’administration de l’EPAHD Bethany Home n’a pas manqué de rappeler ce rôle qu’il avait auprès des anciens. «Après avoir parlé avec plusieurs, mon impression est que la maison de retraite comme on l’appelle communément, n’aurait pas vu le jour si tôt si ce n’était pour Albert Fleming», raconte-t-elle.

«Je me suis laissée dire qu’il répétait souvent : sans nos vieux, sans nos anciens, nous ne sommes rien. Ils détiennent la mémoire du territoire et la transmettent. Ils sont les conservateurs de la culture saint-martinoise. Si nous sommes là, aujourd’hui c’est à cause d’eux et donc nous leur devons honneur et respect», poursuit Audrey Gil.

La présidente du conseil d’administration de l’EPAHD Bethany Home qu’elle représente, a tenu à revenir sur la genèse de l’établissement. C’est un 2 mai 1990, alors que personne n’y pense et ne considère cela comme une priorité, accompagnée d’autres personnes de la société civile, il crée une association dont l’objectif sera de s’occuper des personnes âgées dépourvues de moyens d’auto-subsistance. Les premiers résidents sont au nombre de cinq.

Cette association est nommée «Bethany Home ». Son nom n’est pas innocent. Bethany, dans la Bible, se révèle être une cité par excellence, un lieu de repos, un refuge, un lieu de retraite. Et donc, quand Albert Fleming et ceux qui l’accompagnaient ont nommé cet EPAHD «Bethany Home». Il était important que la personne âgée, en fin de vie puisse disposer d’un lieu de repos, d’un refuge, d’un endroit où elle n’aurait plus à se soucier des tracas de la vie, un lieu où, tout doucement, elle se mettrait en retrait et profiterait des joies simples de la vie.

Selon Daniel Gibbs, ancien président de la collectivité, Monsieur le Maire incarnait et incarne une image de Saint-Martin qui "embarque pour le progrès", «il a veillé à l’unité et à la cohésion». Deux mots qui avaient "un puissant sens" pour Albert Fleming car c’était le souhait de cet homme «au charisme exceptionnel», que Saint-Martin soit uni et reste uni. «Pour ceux qui ne comprennent toujours pas la portée de son puissant message je le dirai de façon biblique : une île divisée contre elle-même ne peut subsister», rappelle Sonia Fleming.

Vincent Berton, préfet délégué des îles du nord, a tenu à exprimer au nom de l’État l’hommage de la France au grand serviteur, Albert Fleming. Il a notamment rappellé le discours de 1992, où Monsieur le Maire exhortait aux Saint-Martinois de s’unir plus que jamais dans la solidarité, la fraternité et la tolérance pour un meilleur Saint-Martin.

Par ailleurs, durant ces vingt-sept années au service de la population, Albert Fleming désirait hardiment que Saint-Martin soit pleinement reconnu dans son identité. «Le soir même du référendum où Saint-Martin a été adopté en collectivité unique, sur les balcons de la mairie, Monsieur le Maire criait free at last. Trois mots qui symbolisent la personnalité de celui que le peuple  tout entier pleure. Free at last, c’est le cri de tout un peuple mais celui surtout de la vision d’un bâtisseur issu des quartiers populaires de Sandy Ground et qui a gravi tous les échelons de la société sans jamais oublié qui il était ni d’où il venait », se remémore Adrien Baron, maire de Saint-Rose, conseiller départemental de la Guadeloupe

Albert Fleming c’est aussi ce personnage emblématique de l’île, qui restera l’une des personnalités les plus importantes dans le développement touristique et économique de l’île. «L’un des visionnaires du territoire lorsque le poumon économique de l’île battait son plein», exprime Valérie Damaseau, présidente de l’office de tourisme.

Enfin pour Louis Mussington, il est indéniable qu’Albert Fleming a donné sa vie pour cette terre de Saint-Martin qu’il a aimée passionnément, envers et contre tout. «Pour beaucoup, il n’était pas seulement leur leader mais il a aussi été un tuteur, dans certains cas et un parent dans d’autres... et avant tout, un homme honnête. Albert comme la plupart l’appelait, était populaire auprès de nombreux habitants et visiteurs qui approuvaient son style de gouvernance sans arrière-pensée. Sa simplicité, son accessibilité faisaient de lui un véritable homme du peuple », salue le président de la collectivité.

Albert Raoul Fleming, aurait eu 87 ans. Natif de Sandy Ground, le maçon et entrepreneur qu’il était, a toujours voulu bâtir au service de son territoire, pour son territoire. Il est élu maire en 1983, fonction qu’il occupera jusqu’en 2007.

Siya TOURE