02.10.2024

La sensibilisation comme arme de défense contre les violences sexuelles lors de La nuit du droit

A l’occasion de La nuit du droit qui se déroulera vendredi au tribunal de proximité de Saint-Martin à Marigot, le docteur Leïla Chaouachi, experte de l’enquête nationale sur la soumission chimique tiendra une conférence sur le sujet aux côtés du docteur Frédéric Olivo.

«1 229 agressions facilitées par les substances, où les victimes pensent avoir été droguées à leur insu, ont été enregistrées en 2022 au niveau national » indique le Docteur Leïla Chaouachi, pharmacienne au centre d’addictovigilance de Paris et experte de l’enquête nationale sur la soumission chimique auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

« La soumission chimique est le fait de droguer une personne à son insu ou sous la menace, donc sans son consentement, pour commettre un délit ou un crime comme le viol, l’enlèvement, la séquestration, le vol ou même la traitre d’êtres humains » explique Leïla Chaouachi. «1 229 agressions, ce n’est pas rien, on remarque une augmentation de 69% par rapport à 2021. Cependant, même si ces chiffres sont assez conséquents, il faut garder en tête que tous sont largement sous notifiés ». En effet, en France, l’accès aux analyses toxicologiques est conditionné au dépôt de plainte dans le circuit général d’organisation. Ainsi, 80% des données actuelles sont issues de plaintes. Or, dans le cas de violences sexistes et sexuelles, entre doute, culpabilité et intimidation, moins de 10% des victimes portent plainte.

C’est la raison pour laquelle l’experte de l’enquête nationale sur la soumission chimique encourage vivement les victimes, dans le respect de leur souhait, à déposer plainte le plus rapidement possible.« D’abord parce que c’est à partir de celle-ci que tout se met en place mais aussi parce que la notion de temps est très importante car les substances présentes dans le corps s'éliminent très rapidement. Au bout de cinq jours les examens sanguins deviennent inutiles». L’urgence sanitaire, les risques de grossesses ainsi que la détresse psychologique sont aussi à prendre en compte. À Saint-Martin, des dispositifs comme France victime ou La maison des femmes peuvent aider dans ces démarches.

La sensibilisation comme arme de défense

« Aujourd’hui, on a suffisamment d’éléments pour penser collectivement à des circuits d’amélioration de la prise en charge des victimes ». Pour Leïla Chaouachi, l’objectif actuel est de continuer d’améliorer le recensement des cas, tout en facilitant la collecte des preuves. Pour cela, casser les idées reçues délétères à la prise en charge est nécessaire. « On pense que les victimes de soumissions chimiques sont uniquement des jeunes femmes. Si c’est majoritairement le cas, les hommes et les personnes transgenres peuvent aussi en être victimes. L’âge de celles-ci commence à 9 mois et finit à 90 ans. Les agressions en revanche, sont majoritairement commises par des hommes. D’ailleurs les agresseurs ne sont pas toujours des loups solitaires à la recherche d’une proie facile et sont le plus souvent connus des victimes. La soumission chimique est une affaire de confiance trahie dans la majorité des cas ».

Pour lutter efficacement contre l’usage criminel des substances dans la sphère festive comme dans la sphère personnelle, le travail de sensibilisation et de formation comme peut le proposer La nuit du droit est indispensable pour le grand public.

« C'est une réalité et même ici à Saint-Martin, dans les bars, dans les boîtes, dans les festivals, il y a ce genre de comportement. Les gens doivent se saisir du sujet pour se mettre en sécurité » indique Frédéric Olivo.« Rien ne fera barrage aux crimes mais quand on connaît le sujet, on peut adopter les bons réflexes ».

En plus« de formidables élans de vigilance solidaire en 2022 », une conscientisation de cette réalité s’opère aussi du côté des professionnelsavec « une réelle volonté de monter en compétences via de nombreuses demandes de formations. Ils ne veulent plus passer à côté de violences » conclut positivement Leïla Chaouachi.

Nuit du droit à Saint-Martin

Leïla Chaouachi interviendra à La nuit du droit ce vendredi 4 octobre, aux côtés du Docteur Frédéric Olivo, addictologue au centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), lors d’une conférence sur les crimes sexuels et la soumission chimique. Un thème tristement d’actualité, avec le procès des viols de Mazan où 50 hommes sont accusés d’avoir abusé de Gisèle Pélicot alors droguée par son mari.

L’événement se déroulerade 14 à 17h au tribunal de proximité de Saint-Martin. L’entrée est libre.

Cyrile POCREAU