Que sont devenus les animaux domestiques depuis Irma ?
« Les chevaux vont bien ». Le 6 septembre, sur sa page Facebook, le centre équestre de Colombier Sea, Horse & Sun rassurait ses abonnés. Le dernier post, publié deux jours plus tôt, indiquait : « le reste des chevaux du Club sont partis cet après-midi rejoindre les autres pour le passage d'Irma. Ils seront plus en sécurité dans un grand pré en liberté plutôt qu'au Club où ils risqueraient de prendre des projectiles ».
Moins de 30% de pertes parmi les animaux d'élevage
Propriétaires de chevaux et éleveurs ont généralement lâché leurs bêtes avant l’arrivée de l’ouragan. « Lorsqu’on les laisse dans les zones montagneuses, les animaux arrivent à se trouver des abris. J’ai toujours eu des chèvres, les ai toujours lâchées dans la montagne avant un cyclone et les ai toujours retrouvées après » assure Dorvan Cocks, le vice-président de la CCISM en charge de l’agriculture.
Les animaux dont les pâturages étaient en bord de mer ou d’étang ont été moins chanceux. Des dizaines de chèvres auraient ainsi été emportées par les vagues à côté de la Belle créole et à Quartier d’Orléans. Quant aux poules, et aux animaux laissés dans leurs étables, cages et abris, leur survie dépendait de la résistance du bâti.
En décembre 2017, Dorvan Cocks, annonçait un peu moins de 30 % de pertes parmi les cheptels que compte Saint-Martin. : « nous comptons 7 pertes sur les 580 bovins, 180 sur les 2 000 caprins et 2 500 sur les 10 000 volailles ». Seules quelques ruches ont par ailleurs résisté.
Depuis, les pertes ont augmenté. En cause, la sécheresse de la saison actuelle : « il me reste deux ruches sur trois depuis Irma. Mais les colonies ne se développent pas en l’absence de végétation. Les abeilles ne sortent pas beaucoup comme il n’y a pas de fleurs. C’est une période de diète pour tout le monde » témoigne un apiculteur. Mais aussi, la destruction de la totalité des clôtures par l’ouragan.
Absence de clôtures, plus de morsures
Dans les premiers jours qui ont suivi le passage d’Irma il n’était pas rare de croiser des animaux en errance. Ceux qui ont attendu dans un champ à Hope Estate avant d’être évacués par l’aéroport de Grand Case ont d’ailleurs côtoyé cochons et autres animaux de la ferme. Les militaires du RSMA avaient dû prêter main forte aux éleveurs pour fabriquer une clôture et y parquer les animaux.
Reconstruire toutes les clôtures est un travail de longue haleine. Sans elles, les troupeaux sont en danger : « plusieurs éleveurs de caprins m’ont dit avoir perdu récemment la moitié de leur bétail à cause des chiens » avance Dorvan Cocks.
L’absence de clôture, non seulement autour des champs, mais aussi des jardins privatifs, a pour effet d’augmenter les confrontations entre animaux. Et notamment entre chiens. Qu’ils soient errants ou aient des maîtres, leurs interactions se transforment souvent en combats et s’achèvent par des morsures. « Nous avons beaucoup plus d’animaux à suturer » rapporte un vétérinaire.
Des centaines d'abandons de chiens et de chats
Suite à ce qu’Emmanuel Macron a qualifié de « l’un des plus gros ponts aériens mis en place par l’Etat français depuis la seconde guerre mondiale », environ 8000 personnes ont quitté l’île. Parce qu'ils n'ont pas pu monter dans l'avion ou parce que leurs propriétaires n'avaient plus de logement, des centaines d’animaux de compagnie ont été abandonnés.
Certains maîtres se sont arrangés en les laissant chez des amis et en les faisant voyager par de tierces personnes une fois les lignes commerciales rétablies. Les réseaux sociaux, et en particulier les groupes Facebook, ont joué un rôle important dans la mise en relation des uns et des autres. Y compris pour tenter de faire adopter les chiens et chats abandonnés dans la nature. Ou bien pour retrouver ceux qui étaient perdus. Les chiens non vaccinés ont, quand ils ont survécu à Irma, dû faire face à une épidémie de maladie de Carré qui a causé beaucoup de décès, notamment parmi les chiens errants.
Le refuge pour chiens géré par I Love My Island Dog (ILMID) a été entièrement détruit par la mer. Fort heureusement, il était vide explique Ursula Oppikofer la présidente et fondatrice de l’association : « on avait 38 chiens. Une semaine avant Irma on a lancé un appel et grâce à Facebook, aux journaux et aux bénévoles, on les a tous casés dans des familles d’accueil ». Mais le refuge étant détruit, et Ursula Oppikofer n’ayant plus ni téléphone, ni internet, l’association a du mal à récupérer les canidés. « J’ai alors donné rendez-vous tous les jours à 15h à Hope Estate pour que les gens puissent venir me voir. Ça s’est su par bouche à oreilles. Certains ont gardé les chiens parce qu’ils ont compris la situation et s’y étaient attachés : ils ont vécu des moments forts avec les animaux. Quelques-uns les ont perdus, parce que quand les maisons étaient cassées le chien qui était là depuis la veille n’a rien compris et s’est enfui. Il y en a que l’on n’a pas retrouvés mais qui sont certainement chez d’autres personnes. Tous nos chiens ont une puce électronique mais les gens ne pensent pas forcément à aller chez le vétérinaire pour vérifier. » Elle ajoute que des habitants partis en panique ont réussi avec la collaboration de la fourrière et de la SPA à se faire rapatrier leurs chiens vers la métropole.
Toutes les associations de la partie française et hollandaise ont collaboré pour faire évacuer par avion le 6 octobre 2017, 167 chiens et chats de l’île mais également d’Anguilla et Ste-Eustache vers des refuges en Floride et dans le Tennessee. « Puis une douzaine des nôtres ont été envoyés à la SPA en France. Un avion privé venu de Saint-Barth’ est venu chercher les chiens à Grand Case puis les a emmenés en Guadeloupe, payé par la fourrière. La SPA a ensuite pris en charge le trajet de Pointe à Pitre à Paris» avance Ursula Oppikofer. « C’était un boulot de fou, heureusement qu’on a tous travaillé ensemble ! » commente-t-elle.
Relâcher un animal dans la nature n'est pas toujours bon pour la nature
Par ailleurs, certains Nouveaux Animaux de Compagnie (espèces exotiques) ont été lâchés avant Irma. Un piton a été retrouvé dans le jardin d’une copropriété à Cul de Sac, où cinq enfants en bas âge jouent fréquemment. « Pour certaines espèces, ce type de comportement des propriétaires peut être néfaste à notre Environnement déjà stressé, voire représenter un danger sanitaire ou de sûreté pour l’Homme. Si en plus, on parle de plusieurs individus de sexes différents et non-stérilisés, la population ainsi relâchée peut devenir problématique à l’échelle de plusieurs générations et même s’implanter durablement sur l’ile. C’est le cas à Saint-Martin de l’iguane commun, de la mangouste, du raton laveur ou du singe vert » met en garde Julien Chalifour responsable scientifique pour la Réserve naturelle.
(Photo prise le 11 septembre 2017 à Hope Estate)
Commentaires
A bon, avant il y avait des
A bon, avant il y avait des clotures ???