Huit mois de prison ferme et mandat de dépôt pour avoir caillassé un gendarme
Les images de la vidéosurveillance témoignent de la violence du geste de Jean-Manuel, un jeune de 21 ans qui a lancé un pavé sur un gendarme lors d’un simple contrôle sur la voie publique le 25 février dernier. «On voit très bien qu’il prend de l’élan... C’est un mouvement très ample», note le vice-procureur Yves Paillard.
Ce jour-ci, les gendarmes en patrouille à Sandy Ground voient un groupe de quatre individus consommer du cannabis. Ils décident alors de les contrôler. Mais appelés sur une autre intervention, ils quittent les lieux. Ils reviennent une demi-heure plus tard et voient toujours le même groupe d’individus, seul un est parti entre temps. Les militaires demandent l’identité à l’un d’eux qui refuse. Un deuxième individu prend la fuite et le troisième, Jean-Manuel, à qui rien n’est demandé, prend un peu de recul, se saisit d’un pavé et le lance sur un gendarme. Ce dernier a le réflexe de protéger son visage avec son bras ; son coude sera tout de même touché. Il aura un point de suture et une ITT de 4 jours délivrée trois jours après les faits.
IDENTIFIÉ GRÂCE AUX IMAGES DE VIDÉOSURVEILLANCE
Jean-Manuel sera identifié grâce aux images de vidéosurveillance et interpellé jeudi 9 mars. À l’issue de sa garde à vue, il a été présenté vendredi matin devant le tribunal correctionnel de Saint-Martin selon la procédure de comparution immédiate.
Jean-Manuel est seul à l’audience. Seul son frère de deux ans son cadet, est présent. Sa situation sociale est précaire. Il a un contrat jusqu’en mai au sein de l’association Sandy Ground on the move. La directrice confirme que c’est «quelqu’un de sérieux et de ponctuel». Il vit avec ses parents et ses deux frères à Sandy Ground mais ne sait pas ce qu’ils font comme métier, à part son père qui est maçon. L’enquête sociale indique un manque de communication au sein de la famille. Jean-Manuel a arrêté l’école quand il avait 14 ans car cela ne lui plaisait pas. Depuis, il fait des petits jobs. Il perçoit 500 euros par mois et donne 200 à sa mère pour l’aider.
Il fume deux joints par jour - un le matin, un le soir - depuis qu’il a 18 ans. Il ne veut ni arrêter, ni se soigner. «Cela me calme», justifie-t-il. Il achète pour vingt dollars par mois de cannabis avec «son argent». Aussi n’accepte-t-il pas que les gendarmes lui prennent sa drogue. Et encore moins qu’ils lui disent qu’il n’a pas le droit de fumer devant chez lui. Il ne trouve pas normal d’être arrêté au motif qu’il consomme du cannabis car il pense que c’est légal. Le comportement des forces de l’ordre l’a donc énervé et il a lancé un pavé. «Je ne pensais que ça allait toucher le gendarme», confie-t-il. Selon les conseils de son avocate, il a dit regretter son geste. Il a demandé au gendarme son prénom et s’est s’excusé.
La réponse du parquet a été «immédiate». «On ne veut pas de groupes hostiles aux gendarmes. Nous ne sommes pas dans ces cas de contrôles humiliants de jeunes en métropole, qui peuvent se voir mettre contre un mur par les policiers devant leurs copines. Nous sommes là dans le cas d’un simple contrôle de routine», commente Yves Paillard. Et le président du tribunal d’insister : «vous n’étiez pas celui à qui le gendarme demandait son identité car il fumait. À vous, on ne demandait rien». Les deux autres jeunes ont pris la fuite et n’ont pas été identifiés par les enquêteurs.
Le parquet requiert une peine de huit mois de prison ferme et demande un mandat de dépôt en raison de la situation de récidive. Le prévenu a déjà été condamné par le tribunal pour enfant en 2013 pour avoir planté un coup de couteau à son grand frère lors d’une dispute. Il avait aussi arraché le sac à une femme dans la rue et avait été mis en cause, mais sans être poursuivi, dans une affaire de caillassage de gendarmes en 2013.
"IL NE COMPREND PAS LE RÔLE DES GENDARMES"
Maître Lacassagne, avocate commise d’office, a axé sa plaidoirie sur le manque d’éducation de son client et sur le fait qu’une peine d’emprisonnement ne sera pas efficace. «Comme de nombreux jeunes Saint-Martinois, il ne comprend pas le rôle des gendarmes. Ils considèrent leurs contrôles comme des intrusions dans leur vie, comme des provocations. Ils réagiront ainsi tant qu’on ne leur explique pas le rôle et la mission des gendarmes. Et ce n’est pas en prison qu’ils apprendront à les respecter», conçoit-elle.
Malgré ces arguments et après en avoir délibéré, le tribunal a suivi les réquisitions du vice-procureur. Jean-Manuel écope d’une peine de huit mois de prison ferme et doit verser 500 euros de dommages et intérêts au gendarme blessé qui s’était constitué partie civile. Un mandat de dépôt a en outre été prononcé à son encontre. Il part donc dès ce vendredi après-midi en prison en Guadeloupe. Une peine que le jeune frère n’a pas comprise et qui lui a été expliquée par les gendarmes présents pour accompagner Jean-Manuel. Les deux frères se sont embrassés et serrés dans les bras avant de se quitter.
Commentaires
Franchement, il serait bien
Franchement, il serait bien que les gendarmes fassent preuve d'un peu de discernement.
Alors que dans beaucoup de pays, la consommation d'herbe est légale, en France on en fait tout un plat.
En plus, interpeller des jeunes à Sandy Ground est toujours risqué, est-ce que pour un joint tout ceci valait la peine?
Si la gendarmerie prône la tolérance 0, qu'elle interpelle les scooters et motos qui font la course à la Baie Nettlé...