Produire localement des cosmétiques naturels
Au cœur d’une petite boutique, située dans la zone commerciale de Simpson Bay qui fait face au cinéma, se déploient les 80 déclinaisons de St Maarten Nectar dans une odeur de citronnelle vaporisée. Constituée d’une directrice et de quatre employées, l’entreprise, exclusivement féminine, accueille aussi volontiers les hommes. «Avant l’équipe comprenait un garçon mais il est parti pour aller danser à Broadway» raconte Nalia Muriel, fondatrice et directrice de la marque. Candice, une des employées, s’occupe de l’étiquetage dans l’arrière boutique tandis que ses collègues s’affairent calmement au-dessus, au laboratoire, coiffées de leur charlotte.
Fondée en juillet 2010, la marque est présente dans la plupart des pharmacies des deux côtés de l’île ainsi que dans les boutiques de certains hôtels. Le produit phare correspond au premier né : le répulsif anti-moustiques (Bug 0%), qui existe aussi pour les enfants (Baby Bug 0%). Après les crèmes solaires, les soins corporels et les désodorisants (et désinsectisants) pour maison, St Maarten Nectar a sorti sa gamme visage fin 2014 qui a fait « un boom ». «Ce sont désormais les deuxièmes produits les plus vendus» souligne la jeune chef d’entreprise. Le marché de cette petite entreprise s’étend sur dix îles des Caraïbes (St Barth, Anguilla, Saba, Guadeloupe, Martinique, Guyane, St Kitts & Nevis…) et s'est implanté récemment à Charlotte (Caroline du Nord). Plusieurs ventes s’effectuent également via le site internet. «On reçoit entre deux et quatre commandes par semaine qui proviennent à 90% des Etats-Unis, mais aussi d’Europe et même d’Asie» avance Nalia dont le sourire généreux laisse transparaître la bienveillance.
"DES PRODUITS A LA FOIS EFFICACES ET NON AGRESSIFS"
Née à Saragosse, elle part travailler à Barcelone pour une société hollandaise après des études en Ressources humaines. Elle est ensuite mutée aux Pays-Bas où elle apprend le néerlandais. Lassée entre autres du climat, elle s’installe à Saint-Martin en 2003, où elle apprend le français en regardant la télé. A son arrivée sur l’île, elle se voit confrontée à un problème de taille : «j’étais obligée d’utiliser du répulsif et d’hydrater ma peau tous les jours. Et je ne trouvais rien qui soit à la fois efficace et non agressif». Elle se met alors à fabriquer ses propres lotions dans sa cuisine. Très vite, elle équipe également ses amis et suit des formations spécialisées à distance.
Artisanale, son activité démarre donc grâce au bouche-à-oreille. Depuis, tout le processus est rigoureusement encadré. Le Ministère de la santé de St Maarten a testé les ingrédients et contrôlé les étiquettes. L'entreprise respecte également les normes européennes ainsi que celles de la FDA (US Food and Drug Administration). Quant à la gamme Bug 0% (adultes et enfants), elle est prescrite par les médecins dans les hôpitaux de l’île et de Guadeloupe. Un succès qui tient d'une part au manque de production locale, mais aussi sûrement à une exigence contemporaine : proposer des produits les plus naturels possibles. «La majorité des cosmétiques que l’on trouve sur le marché compte une vingtaine d’ingrédients que l’on ne peut pas lire et qui ne sont pas nécessaires. Les nôtres en contiennent au maximum sept. » Nalia va chercher la plupart des ingrédients directement à la source : l’huile d’argan vient du Maroc, celle d’arbre à thé d’Australie et elle importe les huiles de coco, d’aloé et d’avocat de Californie. A terme, son objectif est de produire ces huiles sur place «pour nous et pour les autres».
TRANSMISSION ET PREVENTION
Avec ses produits respectueux de l’environnement, St Maarten Nectar s’inscrit dans une démarche de développement durable. Le laboratoire reçoit des visites toutes les semaines, qu’il s’agisse de touristes ou de scolaires. «C’est très important pour moi de montrer aux enfants que l’on peut produire sur l’île parce qu’ils ont souvent la sensation que pour réussir il faut partir.» Compte tenu de la prolifération alarmante du virus, Nalia Muriel a décidé de lancer une campagne de prévention contre le Zika dans les écoles de la partie hollandaise. «Ici, les enfants grandissent au milieu des moustiques et ne voient donc pas l’urgence de se protéger. On commence toujours par leur demander quel animal est le plus dangereux. Et ils sont très surpris en apprenant qu’il s’agit du moustique.» Interventions dans les classes, dons de diffuseurs d’huiles essentielles, impressions d’affiches… St. Maarten Nectar espère continuer cette campagne et attend une réponse de son gouvernement pour voir s'il compte la soutenir. «Nous avons entamé cette démarche parce que nous considérons que c'est une question de santé publique.»