14.08.2017

Sargasses : «La priorité absolue est une collecte avec égouttage rapide » (3/5)

La mission sollicitée par l’État pour apprécier la problématique des sargasses aux Antilles, préconise des actions pour organiser la collecte des algues.

Sur le terrain aux Antilles, la mission a pu constater «des actions de collecte et de traitement éprouvées peu nombreuses». Elle estime que ces techniques doivent «évoluer et être sélectionnées sur des critères techniques, économiques et environnementaux». L’objectif de la collecte étant de réduire les nuisances générées par les algues tant au niveau sanitaire qu’économique (réduction de l’attractivité et des activités touristiques).

«Les dépôts rémanents de sargasses sur le rivage ou à proximité immédiate génèrent des nuisances avérées», note-t-elle, en raison notamment de leur décomposition chimique qui libère des gaz, notamment de l’hydrogène sulfuré (H2S). Son odeur caractéristique d’œuf pourri se détecte très rapidement, dès de très faibles concentrations : 0,2 à 0,3 ppm. Cela provoque pour «les populations littorales une gêne olfactive à ne pas sous-estimer, des troubles momentanés de la santé, réels mais sans gravité avérée compte tenu des concentrations d’H2S relevées, une dégradation des conditions de vie et des biens». La mission note en outre que «l’impact sanitaire sur le long terme d’une exposition chronique [est encore] inconnu sur le plan scientifique».

Pour la mission, ces «nuisances dues aux émanations gazeuses [peuvent] être évitées si la collecte, y compris un ressuyage des sargasses puis leur transport vers des sites de traitement, est assurée dans un délai de trois jours pour les sargasses échouées à terre et d’une semaine pour les sargasses flottant près du rivage ». C’est, en effet, au-delà de ces délais que les couches de sargasses dégagent des gaz par fermentation, notamment de l’hydrogène sulfuré (H2S). «La priorité absolue est une collecte avec égouttage rapide » dans les zones présentant «des enjeux pour les habitants, les activités économiques ou l’environnement».

Les actions de collecte dont la compétence est celle du président de la collectivité à Saint-Martin, du maire dans les autres îles françaises, peuvent être efficaces si un plan de gestion a été mis en place, lequel doit prévoir les moyens humains et matériels à déployer dès que les arrivées de sargasses sont annoncées.

La mission cite dans son rapport l’exemple de la Bretagne qui doit régulièrement faire face à des échouages d’algues vertes entre les mois de mai et de septembre. « Les moyens peu mobiles (pelles, etc.) sont pré-positionnés près des sites d’échouage tandis que les moyens généralistes restent au siège de l’entreprise concernée (distant d’une dizaine de km) ; la collecte démarre contractuellement une heure après saisine. En période d’échouages moindres, le pré-positionnement est supprimé et le délai d’intervention porté à 12 heures. Avec ces précautions, l’obligation contractuelle de l’entreprise est de collecter 750 m3/jour. »

Selon des éléments physiques, il ne faut pas attendre qu’un important dépôt d’algues se forme sur la plage pour les ramasser pour gagner en compétitivité car la difficulté de collecte augmente avec la décomposition. Il est rapporté qu’un «entrepreneur expérimenté a collecté en une journée 250 m3 d’algues mélangées pour partie à demi-décomposées alors qu’il a collecté sur la même plage mais un peu plus tard 450 m3 d’algues fraîches en une journée». En outre, attendre un retrait par la houle n’est envisageable que sur avis météorologique d’un phénomène d’ampleur.

Enfin, parmi les moyens de ramassage est citée la collecte manuelle effectuée par les brigades vertes. La mission souligne à plusieurs reprises dans son rapport celle de Saint-Martin, «bien organisée» et qui a permis de créer des emplois. Pour elle, il est impératif que ce dispositif soit reconduit. De plus il est préconisé que les acteurs opérationnels (brigadiers et autres agents publics ou privés) soient formés.

La mission est consciente que l’ensemble de ces actions représentent un coût certain que seules les collectivités locales ne peuvent pas assumer. Aussi préconise-t-elle la mise en place d’un fonds spécifique qui pourrait être en partie abondé par l’État.

(photo d'archive, crédit : CIS)

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À suivre…

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La question du financement (5/5)

Estelle Gasnet