Les sages-femmes désormais autorisées à pratiquer l'IVG
Les sages-femmes aidaient à accoucher, elles aident désormais aussi à avorter. Le décret élargissant les compétences des sages-femmes vient d'être publié au Journal officiel du 5 juin 2016. Il leur permet de pratiquer une IVG par voie médicamenteuse au même titre qu'un médecin. Une mesure comprise dans la loi santé adoptée en janvier 2016 pour laquelle il ne manquait plus qu’un décret d'application.
A Saint-Martin, au même titre que les généralistes et les gynécologues, les sages-femmes qui auront préalablement demandé une autorisation puis signé une convention avec l’hôpital Louis Constant Fleming, pourront donc prescrire les comprimés nécessaires à l’interruption volontaire d’une grossesse (IVG) ainsi qu’un arrêt de travail pouvant aller jusqu’à quatre jours.
Selon une sage-femme d’un centre médical spécialisé dans les soins de la femme et de l’enfant à Hope Estate que nous avons interrogée : «ce décret est avant tout une bonne chose pour les femmes». Avorter n’est jamais une décision facile à prendre. En facilitant l’accès à l’IVG médicamenteuse, on limite les pertes de chances conséquentes au dépassement des délais. L’IVG médicamenteuse peut être pratiquée jusqu’à 7 semaines d’aménorrhée incluses (soit 5 semaines de grossesse). Mais entre tout : se rendre compte de la grossesse, prendre rendez-vous pour dater cette grossesse, prendre rendez-vous pour avorter… beaucoup de femmes se retrouvent hors délai et sont alors obligées de subir une IVG chirurgicale, pratiquée sous anesthésie générale.
REVALORISER LA PROFESSION
Parmi les sages-femmes, cette nouvelle compétence ne fait pas l’unanimité. Si la plupart sont pour, certaines sont attachées au fait d’aider à donner la vie et non à avorter. Le décret et la communication qui en découle, ont tout de même l’avantage de revaloriser leur profession. Dans l’inconscient collectif, les sages-femmes sont trop souvent cantonnées à leur rôle d’«accoucheuses ». Pourtant leur domaine de compétences est bien plus large. Elles doivent faire cinq ans d'études. Depuis 2009, elles sont habilitées à assurer le suivi gynécologique des femmes en âge de procréer (et ce jusqu’à la ménopause) et prescrire des moyens de contraception : frottis, examen des seins, pose de stérilet s'ajoutent ainsi à la rééducation périnéale ou à la vaccination de la patiente et de son nourrisson. En cas de pathologie, elles orientent leurs patientes vers un médecin.
Par ailleurs, ¼ de la formation des sages-femmes est consacré au psychologique et au social. Les sages-femmes ne font pas dans l’expéditif. Dotées d’une qualité d’écoute, elles vont pouvoir «entendre ce que les femmes ne disent pas». Les sages-femmes sont considérées être plus disponibles que les médecins et il est courant qu’elles donnent à leur patiente leur numéro de téléphone portable pour qu'elles puissent les joindre en cas d'urgence. Une IVG médicamenteuse peut-être traumatisante. Grossièrement, il s’agit d’une fausse-couche provoquée. L’expulsion du fœtus survient généralement quelques heures après la prise des comprimés, et souvent les femmes sont déjà rentrées chez elles. Savoir qu’elles peuvent bénéficier d’un soutien en cas de besoin, même un dimanche, constitue une avancée.
Selon une étude de l’Ined, parue en janvier 2015, 220 000 avortements sont pratiqués chaque année en France, ce qui représente une grossesse sur cinq. Un chiffre stable depuis 2006. 33 % des femmes avorteraient au moins une fois dans leur vie. Contrairement à des idées reçues, les taux d’IVG sont plus élevés dans les DOM-TOM, en Ile-de-France et dans le Sud. Ce qui s’expliquerait par des inégalités sociales et régionales dans l’accès aux soins et donc à la contraception. A Saint-Martin. selon nos sources 350 à 400 avortements seraient pratiqués par an dont un peu plus de la moitié par voie médicamenteuse. L’IVG est interdite à St. Maarten, mais serait quand même pratiquée.