Que dit le traité de Concordia ?
Depuis plusieurs mois, les contrôles aux frontières cristallisent toutes les attentions. Un argument revient souvent dans les critiques et commentaires dénonçant cette décision : le non respect du traité de Concordia. Nous avons cherché à savoir ce que ce traité dit exactement.
Signé le 23 mars 1648, le traité de Concordia fait figure de document de référence dans l’Histoire de l’île. La plupart des résidents le résume ainsi : il instaure la libre circulation des personnes et des biens entre les deux parties de l’île.
Les auteurs du traité ont surtout écrit les règles de vie sur l’île après avoir rappelé les quartiers dits français et les quartiers occupés par les Hollandais. Ils ont surtout cherché à faire en sorte que l’île toute entière et ses ressources soient utilisées de manière équitable entre les deux parties.
Par exemple les auteurs ont écrit que les habitants d’un côté de l’île pouvaient aller habiter de l’autre côté de l’île sans difficultés mais sous certaines conditions (article 6), que les habitants des deux côtés devaient se partager les ressources issues de la pêche, les ports, rades, etc. (article 5). Les auteurs du traité avaient aussi déjà mis en place le traité de coopération policière de 2010 permettant aux autorités d’un côté d’arrêter un individu sur leur territoire, qui a commis des délits de l’autre côté (article 4) et de le présenter auxdites autorités de l’autre côté.
Le traité
Articles accordés entre les commandans pour le Roy de France en isle St Martin et les commandans pour les Hollandois en ladite isle
Aujourd’hui 23 mars 1648 sont convenis Messieurs Robert de Lonvilliers, escuyer, sieur dudit lieu, gouverneur de l’isle St Martin pour Sa Majesté très chrestienne et Martin Thomas aussi gouverneur de ladite isle pour Nrs le Prince d’Orange et Etats d’Hollande et Mrs Henry de LONGVILLIERS, sr de Beuneveur et Savinien de Courfon, escuyer, sr de la Tour, lieutenant colonel en ladite isle et Mrs David COFFIN, lieutenant d’une compagnie hollandoise et Pitre van ZEUN-HUS, aussi lieutenant d’une compagnie des susdits, qui de part et d’autre ont accordé et par ces présentes accordent :
Article premier
Que les François demeureront dans le quartier où ils sont à présent et habiteront tout le côté qui regarde l’Anguille.
Article second
Que les Hollandois auront le quartier du Fort et les terres qui sont à l’entour d’iscluy du côté du Sud.
Article troisième
Que le François et les Hollandois habitués dans la dittte isle vivront comme amis et alliés par ensemble, sans qu’aucun ne depart ny d’autre se puisse molester sans contrevenir au présent concordat et par conséquent punissable par les lois de la guerre.
Article quatrième
Que si quelqu’un, soit François soit Hollandois, se trouve en délict ou infraction des conventions ou par refus au commandement de leurs supérieurs, ou quelqu’autre genre de faute, se retirait dans l’autre nation, lesdits sieurs accordans s’obligent à le faire arrêter dans leur quartier et le représenter à la première demande de son gouverneur.
Article cinquième
Que la chasse, la peache, les salines, les rivières, étangs, eaux douces, bois de teinture, mines ou minéraux, ports et rades et autres commodités de laditte isle seront communes, et ce pour subvenir à la nécessité des habitans.
Article sixième
Permis aux François qui sont actuellement habitués avec les Hollandois de se ranger et mettre avec les François, si bon leur semble, et emporter leurs meubles, vivres et moyens et autres ustencilles, moyennant qu’ils satisfassent à leurs dettes ou donnent suffisante caution et pourront les Hollandois en faire de même aux mêmes conditions.
Article septième
Que s’il arrive des ennemis pour attaquer l’un ou l’autre quartier, lesdits sieurs concordans s’obligent à s’entre ayder et prester secours l’un à l’autre.
Article huitième
Que les limittes et partitions de laditte isle qui doivant se faire entre les deux nations seront remises par devant Mr le général des François et Mr le Gouverneur de St Eustache, et les députés qui seront envoyés pour visitter les lieux, et après leur rapport fait, diviser leurs quartiers et y procéder comme dit est.
Article neuvième et dernier
Que les prétentions que l’on peut avoir de part d’autre seront remises par devant le Roy de France et MMrs de son conseil et Mgr le Prince d’Orange et les Etats d’Hollande ; ne pourront lesdits concordans fortifier d’une part ny d’autre, à moins de contrevenir audit concordat et de souffrir tous dépens, dommages et intérêts envers l’autre partie.
Ce qui fut fait et passé les jours et an que dessus au morne surnommé des accords et ont les sieurs accordans signé les présentes où assistoit le sieur Bertrand de la Fond, escuyer, sieur de l’Espérance, lieutenant d’une compagnie françoise à St Christophe.
Ainsi signé, de Lonvilliers, Martin Thomas, Henry de Lonvilliers, de Gourpon, David Coppin, de l’Espérance, Fiter van Zeun-hus.