Les gérants d'une supérette n'étaient pas autorisés à travailler côté français
En mai 2019, leur supérette fait l’objet d’un contrôle par les agents de la police aux frontières (PAF). Ces derniers observent une femme et un homme en «action de travail». Il s’agit du couple co-gérant de l’établissement. Après vérification des documents, il s’avère que le couple, d’origine chinoise, n’a pas le droit de travailler côté français. En revanche tous les papiers concernant l’entreprise sont en règle.
La société est poursuivie pour emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail. Elle était convoquée le 15 octobre devant le tribunal de proximité de Saint-Martin. Elle était représentée légalement par l’épouse, HC, le mari n’ayant pu venir à l’audience.
Comme elle l’a fait durant l’enquête de police, HC accompagnée de son conseil, a essayé de convaincre le tribunal de sa bonne foi. HC a grandi à Anguille et est venue sur l’île de Saint-Martin avec son époux lorsque tous les deux ont eu une opportunité de reprendre un commerce à Marigot, en l’occurrence une supérette.
HC a entamé les démarches administratives avec l’aide d’un expert-comptable. Ce dernier a procédé à toutes les démarches auprès de la CCI et autres organismes. Il lui a également fourni un document attestant qu’elle pouvait travailler dans sa supérette. Mais au final, elle n’en avait pas le droit.
Si une personne étrangère domiciliée à l’étranger peut créer et gérer (à distance) une entreprise en France, elle ne peut y travailler physiquement sauf si elle y est autorisée par les autorités. Et c’est cette dernière condition que HC et son mari ne remplissent pas.
HC et son époux résident côté hollandais où leurs enfants sont scolarisés. Ils sont titulaires d’un titre de séjour à Sint Maarten mais pas d’une carte de séjour les autorisant à travailler en France, du moins à Saint-Martin. Ils ne l’ont jamais demandé. «Par ignorance», confie-t-elle. Pour HC, le document fourni par l’expert-comptable suffisait.
A l’audience, les juges ont demandé à HC pourquoi elle avait ouvert son entreprise côté français et non côté hollandais où elle réside en toute légalité. «Car il y avait cette opportunité côté français», a-t-elle répété.
Pour le parquet, il semble délicat aujourd’hui voire impossible pour la prévenue de régulariser sa situation côté français dans la mesure où un étranger ne peut bénéficier d’un titre de séjour des deux côtés de l’île. Il a requis une amende de 5 000 euros.
Depuis les faits, HC assure ne plus travailler physiquement au sein de la supérette et avoir embauché quelqu’un d’autre à sa place. Son avocate, maître Noémie Chiche-Maizener, a tenté de prouver que ses clients étaient honnêtes et que ce n’est que «par ignorance» qu’ils se sont retrouvés accusés de ces faits. Elle a montré les documents remplis et fournis par l’expert comptable ainsi que les deux factures d’un montant supérieur à 1 000 euros chacune, établies par celui-ci pour les prestations de service réalisées. La société de HC est aussi à jour de la TGCA et des autres taxes. Maître Noémie Chiche-Maizener a également insisté sur la personnalité de sa cliente, «particulièrement intégrée et appréciée par les gens de son quartier». Elle a en outre fait part de son incompréhension face à la situation : sa cliente ne serait pas autorisée à travailler côté français mais elle a obtenu une attestation de déplacement de la part de la préfète lorsque la frontière était contrôlée. «Si HC et son mari avaient eu connaissance des démarches à réaliser, ils l’auraient fait», a-t-elle insisté.
Après en avoir délibéré, le tribunal a prononcé une amende de 5 000 euros avec sursis.