Ne plus miser uniquement sur le français et l’anglais à l’école
La nuance peut sembler légère mais elle est significative. On ne parle plus de bilinguisme mais de multilinguisme. En 2016, la déclinaison du projet académique à Saint-Martin mettait en valeur la création de cinq classes bilingues ; quatre ans plus tard, le même document va plus loin et mise désormais sur le multilinguisme.
«Mieux valoriser le multilinguisme» dans les établissements scolaires du territoire est l’un des sept plans de travail que compte le D’Pass dans sa nouvelle version pour la période 2020-2033. Un groupe de travail* piloté par Evelyne Fleming a spécifiquement été formé pour élaborer une stratégie et des actions en vue de «concevoir un parcours éducatif des langues de la maternelle à la terminale».
Le groupe de travail a dans un premier temps réalisé une photographie du territoire. Celle-ci a permis de dresser deux principaux constats : «une discontinuité relative de l’apprentissage des langues dans le parcours des élèves du premier au second degré et une prédominance de l’enseignement de l’anglais».
Or cette même enquête a révélé que quatre langues étaient quotidiennement utilisées par les élèves, à savoir le français, l’anglais, le créole et l’espagnol dont la pratique est de plus en plus fréquente. Aussi est-il suggéré d’intégrer davantage cette langue dans les parcours scolaires (comme l’anglais l’a été) en créant des classes bilangues et bilingues. Aujourd’hui, l’enseignement de l’espagnol comme langue vivante étrangère dans le premier degré se fait en fonction des compétences linguistiques des professeurs et ne peut ainsi pas tenir compte du parcours de l’élève.
Concernant le créole, «il commence parfois en sixième et est interrompu en milieu de cursus de collège ou n’est proposé qu’en terminale de lycée professionnel en option», a noté le groupe de travail.
«Pour opérer à l’international, les dix langues les plus demandées ont été classées comme suit d’après une enquête dans le monde des affaires : anglais, chinois, espagnol, arabe, allemand, portugais, russe, français , japonais et hindi. Toutes sont représentées sur notre territoire et trois sur dix sont enseignées dans nos écoles», fait remarquer Evelyne Fleming. Promouvoir ces langues, faire en sorte que le multilinguisme devienne un réel «vecteur de réussite fondé sur l’égalité des chances par l’égal accès aux enseignements » est l’ambition du groupe de travail que Madame Fleming a piloté.
Faire progresser les élèves en langues étrangères passe notamment par un renforcement de la formation initiale et continue des enseignants, la dotation des BCD et CDI en supports techniques plurilingues, la diversification de l’offre linguistique, l’ouverture de sections internationales dans les collèges et lycées favorisant l’obtention d’un bac option international, etc.
Il est aussi proposé la création d’un passeport Langues qui acterait le parcours linguistique de l’élève de la maternelle à la terminale, l’expérimentation d’un cursus spécifique plurilingue au collège avec l’enseignement des disciplines non linguistiques dans deux voire trois langues.
Enfin, il est suggéré l’organisation d’un festival des langues et des cultures des territoires en partenariat avec les COM de Saint-Martin et de Saint-Barth. «La dimension culturelle des langues serait ainsi mise en exergue en exploitant une convergence des actions imaginées».
«L’apprentissage des langues ne doit plus servir à exclusivement à la maîtrise de celles-ci mais plus largement à la maîtrise des apprentissages», conçoit l’Education nationale.
* Il est composé de Marie-Joselyne Arnell, conseillère pédagogique généraliste 1er degré, Katiuscia Hyman, animatrice des classes bilingues 1er degré, Leila Nazzal, professeur d’espagnol au collège à Saint-Barth, Anthony Gombis, professeur d’anglais au collège Mont des Accords, Cédric Lesuperbe, professeur de créole au lycée Robert Weinum et Emmanuel Pené, coordonnateur du Casnav.