Un expert d'assuré poursuivi pour escroquerie
«Le mécanisme de l’escroc» consiste selon le procureur à «faire croire à la juridiction qu’elle n’est pas capable de comprendre». Cette définition a été exposée par le procureur pour qualifier le comportement de XK, convoqué jeudi dernier devant le tribunal de proximité de Saint-Martin pour des faits d’escroquerie au préjudice de RL.
RL, âgé de 77 ans, est – via une SCI – propriétaire d’une villa à Saint-Martin. Résident à l’étranger, il a mandaté localement une agence spécialisée dans la location et l’entretien de villas, pour s’occuper de la sienne. En 2017, la villa est partiellement détruite par le passage d’Irma, l’agence sollicite XK en sa qualité d’expert d’assuré pour le compte de son client. XK visite la villa puis entame les démarches avec l’expert d’assurance.
En décembre 2017, XK fait à RL une proposition d’achat de ladite villa d’un montant de 870 000 euros. Il estime qu’il s’agit de «la valeur du bien une fois rénové». Dans la promesse de vente, il stipule en outre que l’indemnité que la compagnie d’assurance versera, devra lui revenir afin qu’il puisse effectuer les travaux de réparation. Les deux parties signent le document mais la vente n’aboutira jamais.
Plusieurs mois plus tard, RL débarque à Saint-Martin et pense avoir été victime d’une escroquerie de la part de XK et de l’agence de location. Il dépose plainte à la gendarmerie en décembre 2018.
Selon les éléments du dossier, l’agence a indiqué à RL qu’il toucherait environ 80 000 euros ou 150 000 euros* d’indemnité d’assurance ; le faible montant face à la proposition d’achat de XK, l'a poussé à accepter l’offre de vente. Or l’indemnité de la compagnie d’assurance s’élève à quelque 765 000 euros. Un acompte d’un montant de 542 000 euros est versé à l’agence qui le transfère directement à XK qui souhaite débuter les travaux. Or, XK n’est pas encore propriétaire puisque l’acte de vente n’est pas encore signé.
Le tribunal s’étonne d’une part que l’indemnité soit versée à l’agence et non pas directement à l’assuré. D’autre part il observe que XK avait la possibilité d’acquérir une maison évaluée à 870 000 euros sans en payer l’intégralité du prix.
«- L'indemnité d’assurance aurait en fait couvert le prix d’achat de la maison ?, fait remarquer le tribunal au prévenu,
- Au moment où j’ai fait l’offre en décembre 2017 je n’avais aucune idée du montant qui serait inscrit dans le rapport de l'assurance en mai 2018, répond-il.
- Vous êtes expert d’assuré, c’est votre métier… Vous aviez quand même une idée du montant des dégâts !,
- Non pas du tout ! »
XK insiste en affirmant que sa manœuvre est légale. Mais de reconnaître qu’elle «choque les gens». «Mais moi, ça ne me gêne pas», confie-t-il. Ce type d’action est «tout à fait normal», veut-il faire comprendre. C’est le «mécanisme de l’escroc» selon le procureur.
Par ailleurs le propriétaire de la villa a constaté à son arrivée sur l’île que des tableaux dont la valeur garantie est de 60 000 euros chacun, , avaient disparu de la villa. XK l’a aussitôt rassuré en lui disant qu’il les avait mis à l’abri dans un conteneur loué par sa propre société d’expert assuré. Jeudi à la barre du tribunal, XK a souligné que «c’était des croûtes » et qu’il n’avait pas l’intention de les subtiliser. Il les avait enlevés pour qu'ils ne soient pas pillés.
Le procureur a requis une peine de neuf mois de prison avec sursis et une amende de 10 000 euros à l'encontre de XK. Le jugement a été mis en délibéré, il sera rendu le 25 novembre.
Dans cette affaire une représentante de la société de location et d’entretien de villas était aussi poursuivie pour abus de confiance. Mais le décès de celle-ci a eu pour effet d’éteindre l’action publique à son encontre.
* Les deux montants sont évoqués au cours de l’audience.