21.10.2021

Un couple de Vénézuéliens relaxé pour usage de faux dans sa demande d’asile

Un couple vénézuélien a comparu la semaine dernière devant le tribunal de proximité de Saint-Martin pour avoir utilisé une fausse attestation d’hébergement dans le cadre de sa demande d’asile à la préfecture. Il lui est aussi reproché d’avoir obtenu de manière frauduleuse son titre de séjour. Sur le banc des accusés était aussi assise FA, native de République dominicaine, pour avoir fourni ladite attestation. La préfecture était convoquée en tant que victime mais elle était absente et ne s’est pas présentée partie civile.

Fin 2019, la préfecture signale au parquet de Saint-Martin que plusieurs ressortissants du Venezuela ont demandé l’asile en fournissant une même adresse d’hébergement à Sandy Ground. Suite à la suspicion sur la capacité d’accueil de l’habitation, une enquête a été diligentée par la police aux frontières.

Le logement est loué par FA depuis octobre 2017. L’enquête révèle que FA a fourni deux attestations d’hébergement au couple, JCQ et MMC, âgés de 44 et 47 ans. «C’était de mon devoir d’aider quelqu’un dans le besoin », conçoit à la barre FA, elle-même en situation régulière sur le territoire et titulaire d’une carte de séjour de dix ans. Elle reconnaît toutefois avoir uniquement signé les documents, «quelqu’un les avait rédigés. Il y a des personnes à Sandy Ground qui rédigent ces documents», a-t-elle précisé. Elle affirme également que le couple «allait et venait» chez elle, qu’il n’habitait pas à 100 % chez elle. JCQ et MMC le confirment. «Nous sommes chrétiens et avons une église. Nous logions ainsi dans la maison des frères chrétiens », ajoute JCQ.

Le substitut du procureur fait par ailleurs remarquer que la première attestation d’hébergement est datée de début 2018 «or la date du début de l’hébergement mentionnée dans le même document indique fin 2018 : on indique qu’on va héberger quelqu’un un an plus tard ! » En principe, les attestations sont antidatées. «Généralement, c’est l’inverse et c’est ce qui montre l’intention de frauder. Dans ce dossier, ce n’est pas le cas », commente le représentant du parquet qui ne requiert aucune peine à l’encontre des trois prévenus et «s’en remet à l’appréciation du tribunal».

En défense, l’avocat du couple a soulevé plusieurs points qui lui semblaient non conformes à la réglementation. Le principal étant que les services de la préfecture ont demandé un justificatif de domicile au couple dans leur démarche de demande d’asile. «Alors que ce n’est pas une obligation. Lorsque vous demandez l’asile, vous n’avez pas à fournir un justificatif de domicile », a-t-il rappelé. Et de préciser que «la France doit dans certains fournir un logement d’urgence aux personnes demandant l’asile». Le conseil souligne également aucun récépissé n’a été délivré au couple alors que sa délivrance est «une obligation légale». Il dénonce «la grande liberté dont la PAF et la préfecture font preuve dans les démarches d’accès des étrangers au territoire français» en s’appuyant sur des extraits du rapport de la Cimade, association de solidarité active et de soutien politique aux migrants, aux réfugiés et aux déplacés, aux demandeurs d'asile et aux étrangers en situation irrégulière, rédigé suite à sa venue et à ses observations sur le terrain à Saint-Martin.

A l’issue de la plaidoirie de la défense, le tribunal suspend l’audience afin de délibérer. Quelques minutes plus tard, la séance reprend. JCQ et MMC qui se tiennent la main, aux côtés de FA retournent à la barre pour entendre la décision de la juge. Celle-ci prononce leur relaxe en raison d’un manque d’arguments légaux. JCQ, MMC et FA se serrent dans leurs bras en sanglots. Ils remercient le tribunal et leur avocat. Et quittent la salle toujours en pleurs.

A ce jour, ils n’ont pas obtenu l’asile. Ils avaient fui leur pays suite à la crise politique et «pour leur sécurité». Lui était ingénieur pour le gouvernement et elle était vétérinaire.

Estelle Gasnet