Accusé d'abus de confiance, le président de la ligue de volley-ball a été relaxé
Après plusieurs renvois depuis le premier appel de cette affaire fin 2021, TS, président de la ligue de volley-ball des îles du nord (LVBIN) était jugé le 23 mars par le tribunal de proximité de Saint-Martin pour abus de confiance entre le 1er janvier 2018 et le 23 juin 2020 à Saint-Martin.
L’affaire a été initiée à la suite d'un signalement de la préfète des îles du nord le 23 juin 2020. Elle a écrit au procureur de la république concernant la LVBIN. Dans ce courrier, elle a expliqué que depuis 2019, la LVBIN bénéficiait d’une convention pluriannuelle de l’agence nationale du sport visant au financement d’un emploi pour un montant de 12 000 € par an.
La préfète a joint plusieurs documents dont une délibération de la Collectivité de Saint-Martin de 2018. "La ligue de volley-ball avait demandé 100 500 € en 2018 avec une proposition de 50 000 € de la COM, en 2019 elle a demandé la même somme, 40 000 € ont été accordés. Selon la convention de subvention, la COM s'engageait à verser 30 000 € à la ligue dont 20 000 € pour le fonctionnement de la ligue, 5000 euros aux tournois et championnats et 5 000 € pour le volley-ball académique. Mais ce document n’était ni daté ni signé. Néanmoins cette subvention a été versée à la ligue de volley-ball. TS a reconnu avoir reçu des subventions de la COM, « 40 000 € le 23 août 2019 pour des tournois et 30 000 € le 2 septembre 2020 ».
En 2020, la préfecture a lancé un contrôle pour s’assurer de la réalité de la qualité des opérations financées par l’agence nationale du sport. Elle indique que TS n’avait fourni aucun élément malgré plusieurs demandes envoyées par courriels ainsi que trois mises en demeure entre le 17 octobre 2019 et le 9 avril 2020. Une rencontre était prévue entre la préfecture et TS en 2020, mais celui-ci n’est pas venu, sans en expliquer la raison.
En 2020, le service d’évaluation de la Collectivité a demandé à TS de présenter le bilan de la ligue avec des documents justificatifs mais il ne pourra fournir ce bilan. Dans un mail daté du 27 mars 2020 il indique en effet « qu’après le contrôle de l’agence territoriale des comptes, [il] a eu une difficulté car les documents étaient sur une clé usb non fonctionnelle », déclare-t-il.
Le parquet de Basse-Terre a ouvert une enquête en août 2020 et la gendarmerie a effectué une réquisition afin d’obtenir les données bancaires de la ligue entre le 7 janvier 2019 et le 11 janvier 2021. Sur celles-ci la juge a observé « des paiements dont on ne comprend pas l’utilisation, notamment des frais électroménagers, location de voiture, hébergements, gerbe de décès, facture pour des travaux etc.».« Le siège de la ligue était à Galisbay mais il a été endommagé par Irma. Il a donc fallu retrouver un autre local et quelques travaux étaient nécessaires dont une porte à changer, la peinture etc. », justifie le prévenu. « Sur les frais d’hébergements, nous avons fait venir un entraîneur de la Norceca afin de perfectionner nos jeunes pour participer à des tournois caribéens. Alors nous avions la prise en charge de son billet, la location de voiture, l’hôtel, la nourriture, d’où ces frais sur les relevés de compte », poursuit-il.
Cependant, en avril 2020, le représentant de la DRAJES demande des précisions sur le fonctionnement de la LVBIN à la fédération française de volley-ball (FFVB). Le président de celle-ci explique que la LVBIN n’est pas affiliée à la fédération française de volley-ball. « Nous avons discuté avec TS en juillet 2020 qui s’est présenté avec un dossier de demande de subvention auprès de l’agence nationale du sport. Bien entendu, nous avons rejeté ce dossier car, pour nous, il n’y avait plus d’activité à Saint-Martin », a écrit le président de la FFVB. « La LVBIN n’avait ni club, ni licenciés de 2018 à 2020. A la suite de l’ouragan Irma, le conseil d’administration de la FFVB sous ma présidence a voté une mesure solidaire en appliquant une gratuité totale sur les licences des îles du nord. Cette mesure est toujours en application », précise le président.
TS admet qu’il n’y avait pas de licenciés après le cyclone. « Je ne pouvais pas demander aux clubs de payer des licences alors qu’il n’y avait pas d’activité. Nous avons repris le volley-ball académique en 2019, depuis lors, les jeunes ont commencé à payer des frais de participation à hauteur de 50 € », affirme-t-il. « En 2021, j’ai essayé de faire redémarrer la saison. Je cherchais des personnes pour redonner vie aux clubs », complète-t-il.
Par ailleurs, concernant la subvention de 12 000 euros octroyée par l’Etat à la LVBIN en 2019, TS affirme ne pas avoir reçu cette somme. Pourtant le 30 octobre 2019, 12 000 € apparaîssent sur le relevé de compte de la ligue. « On m’a dit que cette somme était bloquée car je n’avais pas fourni de justificatifs, je ne comprends pas », dit-il à la juge. « Il y a beaucoup de on dit et de choses que je ne peux pas justifier. Mais, j’ai essayé de relancer la ligue», explique-t-il.
«Lorsque je me suis aperçu que cette ligue n’était pas affiliée à la FFVB, nous avons arrêté les subventions, car ces 12 000 € représentaient un dispositif sur trois ans », précise le représentant de l’État lors de l’audience. L’Etat s’est constitué partie civile et a demandé la restitution des 12 000 €. La Collectivité n’était pas représentée à l’audience et elle ne s’est pas constitué partie civile.
Selon le procureur, les subventions de la LVBIN sont au service de la jeunesse « mais cette ligue ne comptait ni adhérents, ni licenciés donc pas d’activité », expose-t-il au début de son réquisitoire. « Ces subventions ont été destinées aux frais de fonctionnement de monsieur TS. Par conséquent, il a détourné à son seul profit les fonds et ceux qui en ont bénéficié dans son entourage », poursuit-il. En ce sens, il demande à entrer en voie de condamnation sur « mauvais usage de fonds » et sollicite une peine de six mois de prison avec sursis.
« Je n’ai rien utilisé à des fins personnelles. Je n’ai jamais rien bénéficié de la ligue car ça ne m’intéressait pas. Mon objectif est de mettre les jeunes dans des conditions agréables », ajoute TS avant le délibéré.
Après délibération, le tribunal a acquitté TS des faits qui lui sont reprochés et de la demande de restitution des 12 000 € de l’Etat, faute de preuves concrètes.