13.07.2023

Sandy Ground, la gendarmerie établit les faits

Des violences ont éclaté dans le secteur de Sandy Ground dans la soirée du mardi 11 juillet au mercredi 12 juillet, après la diffusion d’une vidéo impliquant la gendarmerie suite à un accident de scooter. Ainsi, hier matin, Vincent Berton, préfet délégué des îles du nord et Maxime Wintzer-Wehekind, lieutenant-colonel de la gendarmerie des îles du nord ont tenu une conférence de presse afin de rétablir les faits.

Dans cette affaire, « les gendarmes n’ont pas été impliqués dans l’accident. L’individu en scooter n’a pas été renversé ou percuté par une moto de la gendarmerie », insiste le préfet. « Nous sommes transparents et n’avons rien à cacher », ajoute-t-il. 

Tout a commencé le mardi 11 dans l'après-midi lorsque les gendarmes installent un dispositif de contrôle. Depuis son arrivée, le lieutenant-colonel a constaté que les scooters ne s’arrêtaient pas facilement aux sommations des gendarmes. À cet égard, il indique qu’ont été installés des  dispositifs particuliers sur des zones accidentogènes avec un certain nombre de sécurités. « Ces contrôles sont très consommateurs en effectifs puisque c’est plus de 20 gendarmes mobilisés de manière à pouvoir contrôler les personnes en toute sécurité », explique-t-il.

Mardi, un barrage a donc été installé sur la rue de Spring. Deux motards de la brigade motocycliste sont stationnés sur la rue de Mingau, ils aperçoivent deux individus à bord d’un scooter, tous les deux sans casque. « Nous décidons alors de procéder à leur contrôle. Les motards s’engagent derrière le scooter et annoncent aux dispositifs de gendarmes qui sont à 300 m, l’arrivé du scooter », expose le lieutenant-colonel de la gendarmerie.

Voyant les gendarmes au loin, le jeune homme sur le scooter décide de bifurquer à droite, il s’engage sur la rue Richardson. L’un des motards le voit s’engager dans cette rue et quelques dizaines de mètres derrière il s’engage à son tour. Ce dernier remarque que l’individu en question n’a plus sa passagère et « qu'il part à une vitesse excessive. Il prend beaucoup de risques et les gendarmes craignent qu’il ne perde contrôle de son engin sur les dos d’âne », rapporte Maxime Wintzer-Wehekind.

« Nous sommes sur une distance très courte, entre le point de départ du gendarme et le lieu de l’accident, 250 m. En quelques secondes, le motard décide très rapidement de décélérer et de laisser repartir le jeune homme. Au moment où il prend cette décision, un véhicule civile débouche de la rue perpendiculaire à la rue Richardson et le jeune n’arrive pas à l’éviter. Il percute le véhicule à l’arrière », retrace-t-il. « Le gendarme voit littéralement l’individu s’envoler, il se rapproche rapidement de celui-ci pour lui porter les premiers gestes de secours. L’homme sous l’emprise de la douleur gesticule et les gendarmes cherchent à le mettre en position latéral de sécurité comme on nous l’enseigne, on lui apporte les premiers soins en attendant l’arrivée des pompiers », relate le représentant de la gendarmerie des îles du nord qui a partagé une vidéo de la scène pour étayer ses propos.

Suite à cela, une « désinformation s’est propagée sur les réseaux sociaux ». « Il y a cette vidéo qui circule où l’on voit énormément de gendarmes autour de l’individu au sol, c’est normal puisque le motard informe ses collègues de l’accident [ils étaient sur le dispositif rue de Spring]. Ils arrivent donc en renfort pour porter secours en attendant l’arrivée des pompiers », précise le lieutenant-colonel. « Le jeune homme a été évacué au centre hospitalier de Marigot. Son état est stable, il est conscient et sa vie n’est pas en danger », assure le préfet. Par ailleurs, « en aucun cas la personne n’a été plongée dans le coma ou a été dans le coma. Ce sont des propos qui ont circulé sur les réseaux sociaux et qui ont incité l’événement de la nuit du mardi 11 au mercredi 12 juillet », affirme le lieutenant-colonel.

Quatre véhicules de gendarmerie ont été brûlés, deux véhicules impactés et trois commerces vandalisés, établit provisoirement le préfet délégué des îles du nord sur la soirée du mardi au mercredi. Vers 21h30, les gendarmes sont alertés que des poubelles brûlent sur Sandy Ground. « Nous avons donc envoyé une patrouille qui confirme l’incendie. Ils vont remarquer des individus déplaçant des poubelles, d’autres gendarmes restent sur la Baie Nettlé et sentent une montée en puissance des jeunes », décrit Maxime Wintzer-Wehekind. « Le capitaine de permanence décide d’aller directement au contact des jeunes pour chercher à comprendre ce qui se passe en entamant un dialogue. Mais il tombe clairement dans un guet-apens où il se retrouve lui et le gendarme qui l’accompagnait sous une pluie de pavés qui l’on atteint, qui l’ont blessé légèrement et également son collègue », complète-t-il.

Dans les poubelles qui ont été incendiées et les véhicules incendiés les jeunes ont aussi jeté des bouteilles de gaz prises dans un des magasins vandalisés et qui ont explosé à plusieurs reprises au passage des gendarmes. Il y avait aussi une intention claire de ces jeunes de blesser à minima le gendarme », ajoute Maxime Wintzer-Wehekind.

Pour sécuriser le périmètre, la gendarmerie a procédé à une déviation des véhicules au rond-point de l’ancien office de tourisme pour éviter que la population ne se rendent dans Sandy ground. Le but étant d’espérer qu’il y ait une accalmie des jeunes, mais cela n’a pas été le cas. « Une cinquantaine d’individus sont montés jusqu’à notre positon pour harceler les gendarmes qui ont été contraints de se retirer, le temps d’attendre des renforts et de reprendre le terrain en sécurité et sécuriser l’action des pompiers qui devaient éteindre les incendies », relate le lieutenant-colonel.

De ce fait, « nous nous sommes mis dans une posture de défense ferme en espérant que l’atmosphère redescende », indique-t-il. Selon Vincent Berton, les premières victimes de ces émeutes sont les habitants de Sandy Ground. « Nous avons cherché à agir avec le maximum de retenue et d’esprit de paix en apaisant les choses », souligne le préfet. Pour autant, la contribution à cet apaisement a été la coopération avec le président de la collectivité, Louis Mussington, qui est intervenu sur les lieux. Son action a été « indispensable » et « payante », car elle a permis un dialogue avec les jeunes, ce qui a donné à une « désescalade de ces violences », reconnaissent le représentant de l’État ainsi que le représentant des forces de l’ordre. En ce sens, une première accalmie a été ressentie vers 2h du matin, un calme total est revenu vers 5h du matin ce mercredi 12 juillet.

« Pourquoi faisons-nous des contrôles de sécurité routiers ? », interroge le préfet. Selon lui, il n’est pas acceptable que chaque année une dizaine de Saint-Martinois perdent la vie ou se retrouvent handicapés suite à des accidents routiers. « Il faut prévenir les accidents de la route notamment en menant des actions de prévention auprès des usagers, ce que nous faisons. Ces actions de contrôles ne sont pas faites au hasard mais sur des lieux accidentogènes », précise Vincent Berton. « La rue de Spring regroupe plusieurs établissements scolaires, c’est un secteur prioritaire pour la sécurité des Saint-Martinois avant tout », convient-il. Cependant, « il faut garder la proportion des choses, la raison pour laquelle la gendarmerie a des règles de sécurité pour s’assurer que ces règlements soient exécutés au mieux », estime Vincent Berton.

Enfin pour l’État, les événements de mardi démontrent la faille des réseaux sociaux avec la circulation de fausses informations qui peuvent conduire à des actions disproportionnées. Cet évènement reflète également les violences sociales et économiques qui afflige Sandy Ground et les quartiers défavorisés dont la Collectivité et l’État restent attentifs.

Siya TOURE