Police aux frontières : comment elle exerce à l'aéroport de Grand Case
Ingrid Testa, brigadier chef de la police aux frontières (PAF), correspondante de la sûreté de Saint-Martin et Nathalie Hawia, commandante de la police aux frontières de Saint-Martin nous présentent leurs missions de sureté qui complètent celle des contrôles aux frontières au sein de l’aéroport de Grand Case Espérance (AGC).
Tout d’abord, l’aéroport de Grand Case "est unique dans la Caraïbe", déclare Nathalie Hawia. « Il fait partie des huit aéroports spéciaux au niveau national », complète Ingrid Testa. L’AGC compte deux types d’aviation, le commercial et le général c’est-à-dire privé.
Quand Nathalie Hawia rejoint l’aéroport de Grand Case en 2020, sa première mission a été de renforcer le contrôle du secteur de l’aviation privé. Cela signifie qu’aujourd’hui tous les pilotes privés doivent passer par un point d’inspection filtrage (PIF). Auparavant, «à leur arrivée, ils se présentaient à un portail avec leur carte les identifiant en tant que pilote privé et ils passaient», explique la commandante de la PAF. «Désormais ce côté passoire que nous retrouvons encore à Saint-Barthélemy est terminé à Saint-Martin. Tous ceux qui entrent et sortent de l’aéroport sont contrôlés», affirme-t-elle. «L’aviation privée est soumise aux mêmes règles que les vols commerciaux, tandis que dans d’autres aéroports les vols privés ont un espace dédié à eux donc un traitement à part », poursuit-elle.
Ce changement fait suite à l’évolution réglementaire européenne d’une modification par arrêté interministériel de 2023 pour renforcer les mesures de sûreté et des modalités mis en oeuvre sur les directives de l’aviation civile.
Contrôle transfrontalier
Dès lors que vous quittez ou vous entrez sur le territoire national, vous pouvez être soumis aux contrôles de la police aux frontières. Ce contrôle est systématique pour les vols internationaux hors espace Schengen.
Pour les arrivées, il y a deux fils de contrôles, pour ceux de l’espace Schengen et hors Schengen. Pour rappel Saint-Martin ne fait pas partie de l’espace Schengen, cependant, «cela ne veut pas dire que nous ne contrôlons pas les gens de nationalité française, qui relèven de l’espace Schengen mais nous faisons des contrôles aléatoires sur les personnes disposant d’un passeport ou pièce d’identité française», explique Nathalie Hawia.
Mise en situation. Lorsque l’avion atterrit, les passagers débarquent et se présentent aux postes pour les contrôles de police. La situation des voyageurs souhaitant entrer en France est en cours d’investigation. Les policiers effectuent également une vérification dans leurs fichiers pour s’assurer que les passagers en question ne sont ni recherchés ni interdits de séjour. Leur rôle ne se limite pas à mettre un coup de tampon sur un passeport ou un visa, «nous sommes souvent assimilés qu’à ça», reconnaît Ingrid Testa. Pourtant ce métier, va au-delà, il nécessite «une réelle expertise technique et des connaissances réglementaires dans l’analyse des documents», ajoute-t-elle.
Le policier vérifie si le passager remplit les conditions d’entrée sur le territoire (passeport en cours de validité, visa le cas échéant, attestation d’accueil, assurance médicale, billet de retour etc. ). Il doit également se tenir informé de la liste des pays soumis à visa en consultant quotidiennement le fond documentaire mis à jour par le bureau de la réglementation de la DCPAF* et appliquer immédiatement les éventuelles nouvelles mesures.
«Lorsque nous contrôlons une personne, même s’elle n’est pas en situation régulière sur le territoire, ce n’est pas nous qui prenons la décision mais la préfecture et plusieurs paramètres peuvent être pris en compte en fonction de la situation de la personne», indique la commandante de la police aux frontières. «Plus de 300 personnes ont été interpellées cette année, une centaine ont été reconduites dans leurs pays et une quarantaine se sont vu refuser le droit d’entrer sur le territoire saint-martinois », poursuit-elle.
De plus, lors d’un contrôle d’une personne lambda, «la PAF assure avec Antilles Sûreté délégataire employé par EDEIS une vérification aussi bien sur les bagages que sur les personnes. Bien qu’il s’agisse d’une mission conjointe, les agents de sûreté n’ont aucune autorité en matière d’interpellation, ce rôle revient à la PAF, qui intervient en cas de conflit entre passagers et agents au comptoir par exemple », expose Nathalie Hawia.
En 2022, 200 000 passagers ont été contrôlés et 71 inscrits sur les fiches d’inscription des personnes recherchées découvertes.
Sûreté aéroportuaire, point d’inspection filtrage (PIF)
Sans la sûreté aéroportuaire, l’aéroport ne fonctionnerait pas, poste occupé par Ingrid Testa qui est la seule à avoir le titre à Saint-Martin. Pour assurer la sécurité et la sûreté des passagers en vol ou dans les zones réservées, des postes d’inspection filtrage ont été mis en place dans tous les aéroports afin de détecter la présence d’armes ou d’explosifs. Il s’agit d’un travail «délicat» qui doit allier rigueur tout en maintenant la fluidité du trafic, et la satisfaction des passagers.
Les aéroports nécessitent la présence d’un coordinateur de zone et d’au moins deux opérateurs par PIF (un homme et une femme). Ils doivent gérer le flux des passagers et s’assurer que chacun d’entre eux a été contrôlé.
En outre, lorsque vous enregistrez vos bagages, la PAF assure avec Antilles Sûreté délégataire employé par EDEIS une vérification aussi bien sur les bagages que sur les personnes. Les bagages sont scannés et contrôlés par l’agent d'Antilles Sûreté celui-ci vérifie s’il n’y a pas de produits interdit. Les bagages sont scannés à l'aide de rayons X qui pénètrent différentes substances à des degrés divers.
Quand il trouve un objet qui est prohibé, il fait appel à la PAF. Ils ont un rôle de détection, prévention, d’application de mesures et de signalement. « C’est la raison pour laquelle il y a cette proximité des deux services avec la PAF car ces postes ne peuvent pas fonctionner l’un sans l’autre», commente Ingrid Testa.
Être au point d’inspection filtrage est une fonction qui nécessite que les agents soient relayés toutes les vingt minutes car c’est un métier qui demande énormément de vigilance et d’attention. « C’est pour éviter la fatigue visuelle de la personne», explique l’agent.
Fraude documentaire
Certains agents de la PAF sont également spécialistes, analystes en fraude documentaire, ils regardent la conformité des documents présentés, et appliquent le savoir-faire de ces «chasseurs » de faux.
Il existe plusieurs fiches de personnes recherchées que ce soit pour meurtre, amende, interdiction de quitter le territoire, interdiction être accompagnée de ses enfants etc. Depuis leur cabine, les policiers parviennent à profiler certains individus. Dès qu’un doute apparaît sur le document, l’individu est alors orienté vers la deuxième ligne de contrôle pour des recherches plus approfondies. Actuellement l’AGC en compte six et six autres arrivent courants de ce mois-ci.
Enfin, l’aéroport de Grand Case est une petite structure mais, «les règles de fonctionnement sont les mêmes qu’ailleurs», assure la commande la police aux frontières de Saint-Martin. En effet, «ce n’est pas parce que nous sommes à Saint-Martin qu’il n’y a pas de possibilité attentats ou de transport de matières dangereuses. Certes la plateforme est petite mais le travail des agents de sûreté est essentiel, c’est ce qui permet que les passagers et les équipages puissent voyager tranquillement en sécurité», conclut Nathalie Hawia.
*DCPAF : direction centrale de la police aux frontières.