18.09.2024

Initiative Saint Martin Active : un bilan pour redéfinir la stratégie

Initiative Saint Martin Active (ISMA) est à l’origine de la mise en place du prêt d’honneur à taux zéro à Saint-Martin. Après deux décennies d’activités, la création de plus de 1000 entreprises et de 1500 emplois, l’heure est au bilan et à la réflexion pour s’adapter aux nouveaux enjeux économiques et sociaux.

Son président, Jean-Paul Fischer, présentait mardi soir à la presse le bilan des actions, qui, au fil des années, se sont étoffées avec de nouveaux dispositifs, mais qui ne suscitent pas tous le même engouement.

Des dispositifs plus ou moins plébiscités

Le prêt d’honneur, qui demeure le cœur de métier d’ISMA est sans nul doute celui qui attire le plus les entrepreneurs, car il est sans intérêt et peut tout à la fois financer les investissements ou les besoins en fonds de roulement et, est accessible aux créateurs d’entreprises comme aux entrepreneurs en activité depuis 3 à 5 ans. En 2023, ce sont 846 718€ qui ont été engagés, et sur l’année en cours déjà 283 700€.

Le Dispositif Local d’Accompagnement (DLA) de l’économie sociale et solidaire destiné aux associations d’utilité locale, offre un accompagnement en matière d’ingénierie (études, audit, analyses, etc). À Saint-Martin ce dispositif propose tout au long de l’année des ateliers thématiques.

Cité Lab, en partenariat avec la Collectivité et la BPI, est lui censé accompagner les entrepreneurs, en activité ou en devenir, issus des quartiers prioritaires ou en veille active. Mais, il ne suscite que peu d’intérêt auprès de la population, seulement 2 créations d’entreprise sur les 74 porteurs de projets accueillis. Une réflexion doit être menée pour amener la population de ces quartiers à se tourner vers ISMA.

Les garanties pour les prêts bancaires, proposées par ISMA via France Active Garantie, ont représenté 1 873 320 € en 2023 et, au 31 août de cette année, 737 700€. Toute la difficulté de la mise en place de ce dispositif vient de la frilosité des banques.

Des banques trop frileuses

C’est en effet l’un des freins aux Antilles. Si en métropole le cœfficient multiplicateur est aux alentours de 8, aux Antilles il est de l’ordre de 3 à 3,5. En clair pour 1000 €, le prêt global sera de 3500 € ici, alors qu’il serait de 8000 € dans l’hexagone. Un constat qui s’ajoute au montage différent du dossier, comme l’indique le Crédit Mutuel, car l’apport d’ISMA constitue lui-même déjà un crédit. À la décharge d’ISMA, les dossiers présentés sont solides et les porteurs de projets sont souvent plus solvables que les demandeurs lambda. 75% des entreprises financées par ISMA passent le cap des 3 ans.

Quoiqu’il en soit, face à des banques qui ne veulent pas prendre de risques, la solution serait la création d’une société à capital risque. Pour Jean-Paul Fischer, cette capacité de financement est un problème qui existe dans tous les territoires ultramarins et à Saint-Martin les entreprises sont sous-capitalisées.

Mieux accompagner

La formation des jeunes joue également un rôle essentiel et il faut se poser la question de savoir si celles proposées correspondent bien aux besoins du marché. ISMA assure le suivi des entreprises nouvellement créées durant trois ans, et propose des formations de professionnalisation, mais cela ne règle pas pour autant le problème de base. Pour le président d’Isma, le pouvoir politique doit prendre conscience de l’importance du travail qui est fait. Il les interpelle sur leur stratégie, s’étonnant que des entreprises extérieures viennent travailler sur le territoire et que les entreprises saint-martinoises, elles, peinent à s’exporter. La seule solution est de les rendre concurrentielles et c’est en créant « un capitalisme local » que l’on pourra lutter contre la fracture sociale selon lui.

Des exemples probants

En amont de cette présentation, une visite de quatre entreprises était organisée. Quatre exemples qui viennent étayer toute l’utilité de l’accompagnement et de l’aide financière d’ISMA, les quatre ayant bénéficié du prêt d’honneur. La laverie du cœur à Quartier d’Orléans, le restaurant « Tripler daily snack » à Sand Ground, « Lilo Gravure » à Concordia et « Métal Concept » à Hope Estate.

Cette dernière était vouée à être absorbée par un grand groupe avant de disparaître à terme. Le dispositif a permis de garder cette entreprise locale qui, aujourd’hui, s’exporte même en Guadeloupe.

En 2023, ce sont 44 entreprises qui ont bénéficié d’un financement et 89 emplois directs ont pu être créés ou maintenus. Mais après 22 ans d’existence, ISMA doit se remettre en cause pour définir une nouvelle stratégie qui prenne en compte l’évolution du marché, adopter une approche différente de la clientèle, revoir un accompagnement des entreprises… les défis sont nombreux. Une piste évoquée lors de cette présentation est la création d’un guichet unique qui regrouperait France Travail, Isma, la Collectivité, les partenaires financiers, etc., afin de travailler de manière commune, avec un seul objectif, la création d’emplois.

Ann Bouard