Quelle est la situation actuelle du système électrique de Saint-Martin ?
« Bien souvent pour tout le monde, la lumière c’est juste appuyer sur un bouton. L’idée pour nous aujourd’hui, c’est d’expliquer toute la complexité qui va avec » amorce Marie-Line Bassette. Ce mercredi 13 novembre 2024, la directrice régionale d’EDF Guadeloupe exposait lors d’une réunion à la centrale de Galisbay, la situation de l'électricité sur Saint-Martin. « On est face à une crise du système électrique sur le territoire. Cette crise, elle est multifactorielle. Trois éléments majeurs nous conduisent à des situations de tensions avec malheureusement des coupures et des délestages ».
Parmi ces éléments de tension, on retrouve en premier lieu la nouvelle centrale qui tarde à arriver. « Cela fait plusieurs années que les services d’EDF alertent sur la nécessité de renouveler le parc, au regard de l’âge de la centrale existante et de la croissance énergétique. » explique Marie-Line Bassette. « Ce projet a été inscrit dans la PPE, programmation pluriannuelle de l’énergie, document qui doit être co-signé entre l’État et la Collectivité. Or à date, la signature n’a toujours pas eu lieu, ce qui veut dire que les choses ne peuvent pas démarrer et que les moteurs continuent de vieillir. Plus cela tarde, plus nous serons en contrainte sur le système ». Autre frein important mis en exergue concernant cette nouvelle centrale, le manque de terrain sur l’île pour la construire.
Second point de tension : la croissance de la consommation qui est galopante à Saint-Martin. « +7% de croissance pour le premier semestre 2024, ce qui est bien au-delà de ce qui était inscrit comme hypothèse pour définir les moyens de production dans la PPE ». Bien que la population Saint-Martinoise ait augmenté de 0,9% en 2024, cette surconcommation d'énergie n'en est néanmoins pas le résultat. Enfin, dans un contexte déjà tendu, EDF se retrouve confronté à un problème technique sur la tranche la plus récente de la centrale. « Sur trois moteurs, deux sont aujourd’hui à l’arrêt et doivent faire l’objet de maintenance et de réparations. Un d’entre eux attend notamment l’arrivée d’une pièce maîtresse dont le délai, entre la construction, la livraison et le montage, est étalé sur un peu plus d’un an.
« Je tiens à alerter que nous sommes dans une phase de tension, une instabilité importante qui va durer pendant les deux prochaines années. Désormais, nous sommes en déficit structurel en matière de moyen de production et il faut donc agir. Et quand on regarde les trois facteurs principaux, EDF n’est pas le seul à pouvoir le faire » rappelle Marie-Line Bassette. Ainsi pour réduire ce déficit, le géant de l'électricité a étudié trois solutions techniques qui pourront être menées en parallèle. À court terme, une centrale provisoire pendant environ deux ans pour une puissance de 10 à 15 MW. À moyen terme, une centrale temporaire pour une puissance de 30 MW pendant environ sept ans. À long terme, une nouvelle centrale inscrite dans la PPE. Des livraisons de moteurs par conteneurs sont déjà en cours. 1,5 MW devraient arriver d’ici la fin du mois et presque 3,5 d’ici janvier. 5 autres ont été lancés via un appel d’offres. « On travaille sur ces solutions mais nous attendons aussi de voir pour la validation financière par la commission de régulation. La semaine prochaine, je serai à Paris pour leur présenter les dossiers et leur expliquer ce que nous souhaitons faire. Pour le moment, je ne pense pas qu’il y aura un impact sur les factures de nos concitoyens, sous réserve toujours de la validation financière de la commission de régulation, qui définit les prix d’achat de l’énergie. Maintenant, nous risquons d’être fortement challengés et on va nous demander ce que fait Saint-Martin pour réduire sa consommation. »
Au-delà des compétences d’EDF et des signatures de la PPE par la Collectivité et l’État pour la nouvelle centrale, la directrice régionale rappelle donc que chacun doit se sentir concerné et trouver des moyens pour réduire sa consommation d’électricité de façon durable. « Il est urgent que cette partie-là soit activée par l’ensemble des concitoyens. Nous sommes tous acteurs : baisser sa clim d’un degré, c’est une économie de 10% sur sa facture mais aussi sur la consommation globale de l’île ».