21.04.2016

Une mère violemment battue par son fils

Le tribunal correctionnel examinait jeudi une nouvelle affaire de violence intrafamiliale.

Le 14 décembre 2015, une altercation a lieu entre un homme de 43 ans et sa mère. Il finit par la frapper violemment  au motif qu'elle aurait refusé de dire bonjour à sa nouvelle compagne. La tension était grande depuis quelques temps entre eux. Deux jours plus tôt, la mère a refusé de prêter son SUV à son fils pour qu'il aille chercher sa copine , sous prétexte qu’il lui avait emprunté une camionnette plusieurs années auparavant et ne lui avait jamais rendue.

L’homme qui ne s’est pas présenté à l’audience, serait en métropole à la recherche d’un emploi. C’est donc une avocate, commise d’office, qui le représentait lors du procès. Il était jugé par le tribunal correctionnel jeudi matin pour des faits de violences volontaires sur sa mère ayant entraîné une incapacité totale de travail de dix jours.

Au moment des faits il occupait gratuitement un de trois appartements situés en face de la résidence de sa mère, séparés par une cour. Propriétaire des lieux (résidence + les trois appartements), la mère qui n’avait pas engagé d’avocat, a expliqué au juge avoir à nouveau logé son fils après avoir dû rembourser ses loyers et réparer tout ce qu’il avait cassé dans le dernier appartement dont il était locataire.

L’enseignante à la retraite a raconté aux magistrats qu’elle arrosait les fleurs ce 14 décembre quand une dame qui ne s’était pas présentée lui a dit bonjour. Pensant qu’il s’agissait d’une locataire, elle lui aurait répondu «bonjour madame». Mais c'était en réalité la compagne de son fils, qu’elle aurait refusé de rencontrer la veille après la messe alors que son fils voulait lui présenter. «Je faisais la cuisine en paréo, je n’étais pas présentable», s'est-elle justifiée.

L'homme, à qui la compagne rapporte que la dame ne l'a pas saluée, descend quelques instants après pour crier sur sa mère. «Je sais qu'il est violent, c’est pour ça que je n’ai pas réagi» assure-t-elle. Il la suit alors qu’elle se rend dans la buanderie pour déposer son arrosoir «quand j’ai cru qu’il avait fini de parler». C’est là qu’il renverse violemment la machine à laver et fait tomber sa mère avant de la maintenir à terre et d’enfoncer sa main sur son visage. La mère ne parvient pas à crier car son dentier est tombé au fond de sa gorge. Elle raconte que son fils essaie alors d’attraper une poêle sur le congélateur et c’est là qu’elle arrive à appeler à l’aide. Une voisine, témoin oculaire d’une partie de la scène, arrive aussitôt. Le fils se calme et déclare que sa mère est simplement tombée.

Le témoignage de la voisine corrobore le récit de la mère, et une lettre de la plus jeune des filles (sa demi-sœur) dresse un portrait de l’homme que le vice-procureur Michaël Ohayon décrit comme «sévère». Elle y parle d’un «enfant menteur» qui a toujours fait beaucoup de bêtises : fugues, chèques en bois, violences sur son ex-compagne (4 côtes brisées)…

Celui-ci a pourtant une version bien différente. S’il reconnaît s’être emporté et avoir renversé la machine à laver (un modèle américain, en plastique, précise-t-il) causant la chute de sa mère, il nie l’avoir frappée mais l’accuse en revanche d’avoir essayé de blesser son amie avec un parpaing, après la fin de la dispute dans la buanderie. Lorsque son avocate expose sa description des faits, et remet en cause le diagnostic perpétré par un médecin juste après les faits, la mère, en pleurs, sort de la salle d'audience en expliquant ne pas supporter les mensonges de son fils.

Le dossier médical de la victime, auscultée après les faits, indique en plus du choc émotionnel, des contusions à l’épaule et aux cervicales, un traumatisme facial, des plaies dans la gorge dues au dentier qui est tombé, et une hyperhémie conjonctivale bilatérale due à la strangulation (œil un peu sorti et injecté de sang).

En début d’audience, la victime déclarait ne pas réclamer de dommages et intérêts, sachant que son fils n’avait pas d’argent. Le juge lui a expliqué qu’il existait des fonds pour venir en aide aux victimes. Elle s’est alors constituée partie civile et a symboliquement demandé 100€ de dommages. Mais plusieurs fois pendant l’audience elle a affirmé : «tout ce que je veux c’est qu’il se soigne». Le vice-procureur pour qui «les faits paraiss[ai]ent objectivement constatés» a rappelé que l’accusé avait déjà été condamné en 2006 pour violences aggravées.

Interpellé qu’un homme de presque 45 ans vive encore «chez sa maman» sans trop faire en sorte de s’en sortir, il a requis 8 mois de prison assortis d’un sursis, avec une mise à l’épreuve pendant deux ans et une obligation de soins et de travailler ainsi que d’indemniser sa mère. Il a également déclaré que le récit des faits lui a évoqué un commandement religieux ainsi qu’une loi des hommes : « tu respecteras père et mère », traduits en droit positif et dans le code pénal par une interdiction : « on ne frappe pas un ascendant » sans encourir cinq ans de prison.

Lors du jugement, rendu à la fin de l’audience, le juge a déclaré l’homme coupable des faits qui lui sont reprochés. Il est condamné à six mois de prison assortis d’un sursis avec une mise à l’épreuve de deux ans et une obligation de soins, de travail et d’indemnisation de sa mère de 100 € à titre de dommages et intérêts. Sa demande de non inscription de sa condamnation au B2 a par ailleurs été rejetée.

Fanny Fontan