Un couple de gérants chinois d'une supérette condamné pour travail dissimulé

ML et HL, âgés tous deux d’une quarantaine d’années, résident depuis une vingtaine d’années en partie hollandaise où ils ont une carte de résident. Ils ont deux enfants scolarisés en partie hollandaise. Ils sont co-gérants d’une supérette à la Baie orientale depuis 2015. «Nous avons choisi la partie française car il y a moins de braquages qu’en partie hollandaise. Nous avions un commerce à Quartier d’Orléans puis nous sommes venus à la Baie orientale», expliquent-ils.

Au lancement de leur commerce, ils ont effectué une déclaration d’activité auprès de la préfecture comme la loi le prévoyait à l’époque. En effet, MW et HL sont Chinois et en tant qu’étrangers non Européens et non domiciliés en France, ils peuvent créer une société en France et pour cela une simple déclaration auprès des autorités est nécessaire.

C’est dans ces conditions que le couple travaille depuis des années à Saint-Martin. Une situation qui, pour le parquet, n’est pas entièrement légale et génère une «concurrence déloyale». Aussi «s’est-il emparé du problème». Le couple L. est le premier des gérants chinois à être mis en cause à l’issue de contrôles et à avoir été convoqué devant le tribunal correctionnel de Saint-Martin, cinq autre gérants doivent comparaître en janvier.

Pour le vice-procureur, ML et HL font plus que gérer leur activité : «ils participent à sa survie, à son fonctionnement ». A l’audience, il leur a demandé quelle était leur définition du travail, les incitant ainsi à exposer les différentes tâches qu’ils accomplissent. Le couple a ainsi décrit sa journée de travail qui commence par l’achat de marchandises en partie hollandaise, puis par l’ouverture du commerce, la mise en rayons des produits, l’accueil des clients, etc. jusqu’à la fermeture.

Pour le représentant du ministère public, le couple exerce une activité salariée qui doit être déclarée auprès des autorités (Urssaf). Si le couple s’acquitte de l’impôt sur les sociétés, de la licence-patente, de la TGCA, il ne paie en revanche pas les cotisations sociales. C’est pourquoi il est poursuivi pour travail dissimulé.

De plus, la fille du couple donne un coup de main à ses parents durant les vacances scolaires sans être déclarée. Le parquet considère qu’il s’agit de travail dissimulé. L’adolescente étant aussi de nationalité chinoise, elle doit être munie d’une carte de séjour et d’une autorisation de travail pour travailler en France, documents qu’elle n’a pas. Ses parents sont donc aussi poursuivis pour emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail.

Pour l’avocate des co-prévenus, il s’agit d’une «entre aide familiale» qui est autorisée par la loi. Le conseil a une vision différente de la situation de ses clients vis à vis de la loi française. Maître Marion Tillard considère en effet qu’en tant que gérants étrangers non Européens et non résidents en partie française, ses clients peuvent travailler sans avoir à être salariés, donc sans avoir à se déclarer auprès des autorités compétentes. Elle a cité un texte de loi à l’audience.

Non titulaire d’une carte de séjour en France, le couple fait aussi l’objet d’une obligation de quitter la France mais a refusé de signer la notification. «Ils ont tout de même souhaité venir à l’audience pour s’expliquer», a fait souligner maître Tillard.

Le parquet a requis une amende de 10 000 euros à l’encontre de chacun des deux prévenus dont la moitié assortie du sursis ainsi qu’une interdiction de gérer une activité commerciale pendant un an.

Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné chacun à une amende de 10 000 euros.