21.11.2017

Que dit et à quoi sert le rapport de Philippe Gustin ?

Le délégué interministériel pour la reconstruction, Philippe Gustin, a rendu son rapport mardi après-midi au gouvernement à Paris. Il l’a intitulé «repenser les îles du Nord pour une reconstruction durable». Il comprend trente-quatre pages et s’articule en six chapitres :

  • Contexte socioéconomique,
  • Gérer efficacement la phase de transition pour accompagner le redémarrage de l’économie
  • Clarifier les compétences juridiques des acteurs et renforcer le rôle du représentant de l’Etat
  • Repenser l’aménagement des îles du Nord pour prévenir les aléas
  • Mobiliser des sources de financement diverses pour la reconstruction
  • Développer les potentialités de la coopération franconéerlandaise pour rééquilibrer Saint-Martin

Ce rapport dont la finalité a été modifiée en cours de route, présente des objectifs et des méthodes pour reconstruire Saint-Martin après le passage d’Irma dans tous les domaines. Mais pas uniquement en matière de construction, d’urbanisme ou d’aménagement. Il a aussi fait des suggestions pour relancer le tourisme, l’économie, parmi lesquelles pérenniser et simplifier les dispositifs d’aide à la trésorerie des entreprises durant la phase de transition, soutenir le redémarrage des accès aériens à Saint-Martin. Au total, ce sont dix-neuf propositions pour reconstruire Saint-Martin qui ont été faites. Reste à Saint-Martin de les suivre ou non.

Néanmoins, certaines d’entre elles ont déjà fait l’objet d’un protocole que l’Etat et la COM ont signé ce même jour. L’Etat s’est notamment engagé à renforcer ses moyens localement. Il s’est aussi engagé à accompagner la COM dans sa reconstruction au sens large du terme. Il a ainsi été demandé au président de la collectivité de lui présenter des projets concrets permettant entre autres un rattrapage au niveau des infrastructures. Ces projets seront hiérarchisés et pourront être en partie financés par l’Etat. Le cas échant, l’Etat aidera la COM à trouver des financements. Daniel Gibbs a jusqu'au 31 mars pour remettre son plan.

«Avec ce protocole, le gouvernement et la collectivité ont une vraie feuille de route pour la reconstruction. Mêmes objectifs, même méthode, mêmes actions», a commenté Philippe Gustin sur les réseaux sociaux.

Enfin, la carte des aléas qui est en train d'être réalisée en parallèle, sera rendue d’ici à la fin du mois. En matière de reconstruction au sens premier du terme, Philippe Gustin trouve judicieux de pouvoir "fixer une doctrine pour une reconstruction préventive à partir de la carte des aléas mise à jour", qui "impliquerait notamment de réviser les documents d’urbanisme locaux et [de prendre] en compte des nouvelles prescriptions (respect des normes et application du PPRN)". Il évoque ainsi le besoin de réfléchir à "la question de l’urbanisation dans la zone côtière et de l’application stricte de la loi littorale, des nouvelles zones à urbaniser et de la déconstruction à terme de certaines zones urbanisées". Mais dans ce domaine, c'est à la Collectivité de prendre des décisions.

Synthèse des propositions du rapport

Sur les questions institutionnelles et les relations entre l’Etat et les collectivités :

1)  Renforcement du rôle de représentant de l’Etat en charge des intérêts nationaux et garant de l’Etat de droit avec, en priorité, une amélioration du service en charge du contrôle de légalité et une plus grande présence sur le territoire des services de l’Etat de Guadeloupe.

2)  Désignation à Saint-Martin de chefs de projet pour des services ou parties de services de l'Etat et des collectivités, dans un domaine déterminé et pour une durée limitée, par accord entre le représentant de l'Etat et le président du conseil territorial de Saint-Martin ou, à défaut, mise en place de conventions d’assistance à maîtrise d’ouvrage entre l’Etat et la collectivité.

Sur les questions de sécurité et de soutien économique :

3)  Maintien de forces de sécurité crédibles à Saint-Martin et Saint- Barthélemy pour assurer une sécurité optimale et restaurer la confiance des habitants et des acteurs économiques

4)  Reconstruction rapide d’une cité administrative et renforcement des personnels pour permettre aux services de l’Etat de fonctionner de manière optimale

5)  Favoriser les entreprises locales durant la phase de reconstruction

6)  Pérenniser et simplifier les dispositifs d’aide à la trésorerie des entreprises durant la phase de transition

Sur les questions économiques et sociales :

7) Lancement d’une mission d’audit de la situation économique et sociale de Saint-Martin, assurée par l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales

Sur les questions de redynamisation du tourisme :

8) Valoriser le potentiel touristique de Saint-Martin et Saint-Barthélemy par la promotion de la formation professionnelle afin d’avoir un vivier de salariés qualifiés.

9) Soutenir les lits marchands et l'hôtellerie et lancer un schéma directeur comprenant différentes actions :  créer un forum pour sonder les besoins des acteurs et mettre en place avec eux une vraie stratégie touristique sur le long terme ; maîtriser le développement sauvage des locations non classées et peu qualitatives, sans pour autant désavantager celles de qualité, qui répondent aux besoins d’une partie de la clientèle ;  à court terme, favoriser la réouverture de quelques gros porteurs fonctionnant en "resort", indépendamment des loisirs/services de l'île.

10) Soutenir le redémarrage des accès aériens à Saint-Martin pour refaire de l’île un vrai hub dans la Caraïbe

Sur les questions relatives à l’urbanisme :

11)  Prise par l’Etat du décret relatif aux dispositions pénales en matière de construction

12)  Etablir un diagnostic précis du territoire, des équipements, du bâti et de la situation des personnes afin d’établir un plan d’action à court terme, qui impliquerait les mesures suivantes : dresser une nouvelle carte des aléas, qui sera disponible dans les premières semaines de novembre ; établir des relevés cartographiques et topographiques à jour pour que soient déterminés durablement l’emplacement des nouveaux réseaux et équipements à réaliser. Il faudra veiller à ce que pour les premières opérations conduites (rétablissement des réseaux) n’obèrent pas l’avenir et prendre les bonnes décisions en matière d’équipement en tenant compte aussi du risque sismique (enfouissement des réseaux électriques, par exemple) ; établir un diagnostic exhaustif et précis du bâti dégradé selon les différentes typologies de construction (bâtiments publics, habitations, activités commerciales, bureaux etc.). Il s’agira de rassembler les informations sur la base des diagnostics déjà conduits, de procéder aux nécessaires vérifications et de conduire, le cas échéant des diagnostics supplémentaires pour disposer d’un état global et partagé avec l’ensemble des acteurs ; disposer d’un diagnostic social des ménages sinistrés précaires afin de permettre l’accès à un habitat adapté ; bénéficier d’un retour d’expérience partagé des architectes et professionnels sur la gestion de la crise et les dommages constructifs occasionnés par l’ouragan

13)  Mettre en place un plan d’urgence d’intervention à court terme, qui comprendrait les points suivants : recensement des logements provisoires, des zones d’urbanisation ou de reconstruction à bannir, réquisition de bâtiments, sécurisation de bâtiments dangereux, mesures conservatoires etc.

14)  Fixer une doctrine pour une reconstruction préventive à partir de la carte des aléas mise à jour et du porter à connaissance qui l’accompagnera. Cette doctrine impliquerait notamment de :

- réviser les documents d’urbanisme locaux et prise en compte des nouvelles prescriptions (respect des normes et application du PPRN).

Sur le plan de l’urbanisme se posera la question de l’urbanisation dans la zone côtière et de l’application stricte de la loi littorale, des nouvelles zones à urbaniser, et de la déconstruction à terme de certaines zones urbanisées

-  définir les conditions d’éventuelles reconstructions en terrains inondables

-  réaliser un guide pratique et pédagogique pour la reconstruction

-  mettre en place une stratégie conjointe de lutte contre les implantations illégales et une police de l’urbanisme et de la construction

15)Prévoir un renforcement des capacités d’ingénierie locales afin d’apporter assistance et appui à la collectivité, aux divers établissements publics ainsi qu’aux services locaux de l’Etat pour conduire l’ensemble de ces opérations.

16) Engager une consultation internationale ayant pour objectif de recueillir de la part des professionnels des propositions susceptibles d’éclairer les choix relatifs à l’aménagement, à l’architecture et à l’urbanisme sans, à ce stade, d’objectif de projet opérationnel de maîtrise d’œuvre.

Sur les questions relatives aux relations avec la partie néerlandaise(Saint- Martin):

17) Réactiver le Q4, plateforme de dialogue regroupant les deux Etats et les deux collectivités pour relancer une coopération étroite et pérenne entre les deux parties de l’île

18)  Renforcer la coopération dans le domaine de la lutte contre la corruption et de la maîtrise des flux migratoires

19)  Elaborer des projets de construction d’équipements d’infrastructures communs dans le domaine de la gestion des déchets, de l’assainissement ou des réseaux.

Estelle Gasnet
3 commentaires

Commentaires

Parfait et très complet mais il faudrait établir un calendrier et mentionner les urgences Car la population doit gagner sa vie.
Ne pas oublier la dépollution de l'île de ses déchets et autres gravats..
Nous avons une tres Belle île pleine de potentiel, À tous les acteurs de les mettre en valeur.

Bravo, Estelle, pour la qualité de l'info

Favoriser les entreprises locales pendant la reconstruction ??? On s'assied sur le code des marchés publics ???
Relevons les manches, Camarades, y a du taf !!!
Va falloir que chacun prenne ses responsabilités ... Déconstruction à terme de certaines zones urbanisées ... On va les mettre où, tous ces gens ??? En montagne ???