Sargasses : comment financer la collecte et indemniser les entreprises impactées ?(5/5)
De ses observations et rencontres sur le terrain, la mission a admis la nécessité pour les autorités de «passer d’une logique de l’urgence à une logique de gestion de crise : les échouages de sargasses doivent avant tout être considérés comme un risque aléatoire et difficilement prévisible». Elle incite les collectivités à élaborer des plans afin de mieux collecter les algues et de les valoriser. Pour autant, elle est consciente des coûts générés et des besoins financiers. Aussi préconise-t-elle que «les ministères chargés respectivement des outre-mer et de l’environnement approfondissent les variantes possibles et les impacts économiques d’un mécanisme financier». Et de recommander «vivement de mener une étude d’incidence pour valider la mise en place d’un mécanisme financier pour gérer le risque sargasses».
Elle imagine un mécanisme qui permettrait de créer une provision, alimentée chaque année à hauteur de 3 millions d’euros par des subventions de l’Etat aux dispositifs d’insertion des jeunes utilisés pour le ramassage des sargasses et par des taxes additionnelles aux taxes de séjour et aux taxes de transport des passagers aériens et maritimes. «Cette provision serait mobilisable rapidement lors des années à arrivage massif de sargasses et dépensée en fonction des besoins, en complément des contributions courantes de l’Etat et des collectivités», précise la mission. Le fonds serait géré par un comité associant préfet, présidents des collectivités et représentants des communes.
«En l’absence de ce mécanisme financier de provision, l’État et les différentes collectivités auront de nouveau à faire face à une gestion de la crise dans l’improvisation et dans l’urgence», conçoit-elle.
La mission a estimé les coûts (collecte, transport, valorisation) par les collectivités en années dites de crise et en années dites intermédiaires ; pour la COM de Saint-Martin, ils sont de 900 000 et 500 000 euros pour des volumes annuels à collecter de 40 000 et 16 000 mètres cubes.
L’état de catastrophe naturelle peut-il être reconnu ?
Un volet de l’étude est consacré à l’impact économique des sargasses et la mission pose la question de l’indemnisation des dommages subis par les entreprises et les particuliers.
Le principal problème est qu’aujourd’hui les échouages de sargasses ne constituent pas en eux-mêmes une catastrophe naturelle selon le code des assurances pour que l’état de CAT NAT soit déclenché. «Mais ceci ne préjuge en rien d’un changement éventuel d’appréciation, dans l’avenir, de la commission interministérielle», note la mission. En effet, il est acté qu’il s’agit d’un phénomène naturel et non pas causé par l’homme, que les actions préventives en mer sont extrêmement coûteuses, et donc hors de portée des budgets des communes potentiellement impactées.
La mission a en outre essayé de voir si une garantie sargasse pouvait être créée au sein d’un contrat d’assurance au même titre que la garantie tempête. Les professionnels des assurances qu’elle a pu rencontrer, lui ont expliqué que cela était difficile, voire impossible pour deux principales raisons.
La première est que «créer une nouvelle garantie exige une étude approfondie permettant notamment d’évaluer les risques potentiels et la viabilité économique de cette garantie. » Et cette étude n’est pas encore lancée.
Second raison, «ce risque est trop circonscrit géographiquement et ne concerne que trop peu d’assurés potentiels. C’est d’ailleurs là le principal handicap pour cette hypothétique garantie nouvelle : d’un côté, pour qu’elle soit financièrement viable, il faudrait que cette garantie soit en quelque sorte mutualisée à l’ensemble du territoire national, ce qui signifierait concrètement que la très grande majorité des assurés souscrirait une garantie pour un risque qu’ils sont certains de ne jamais subir et ce pour l’unique profit des habitants des côtes impactées aux Antilles et en Guyane, soit une population qu’on peut évaluer à un peu plus de 50 000 habitants et ce qui est donc irréaliste. D’un autre côté, si l’on cherche à mettre en place une garantie « sargasses » optionnelle, à destination, par conséquent, des seules populations exposées à ce risque, le marché est trop étroit pour que cela soit économiquement envisageable. Il n’est d’ailleurs même pas certain que, vu le taux d’assurance aux Antilles, tous ceux qui sont objectivement exposés au risque « sargasses » souscrivent cette garantie optionnelle».
La mission en conclut que la piste de l’indemnisation est «une impasse».
Commentaires
La réponse à ce risque est
La réponse à ce risque est assez symptomatique du mal français. Au lieu de valoriser les sargasses pour les recycler en compost, en aliments pour bétail, en cosmétiques, etc, on ne pense qu'à redistribuer de l'argent public récolté au prix d'une fiscalité confiscatoire.
Une fois de plus, l'Etat préserve son rôle tout puissant en évitant toute initiative qui ne passerait pas par ses Enarques.